LE SYSTÈME
Article
publié dans la Lettre n° 379
du
2 mars 2015
LE SYSTÈME de Antoine Rault. Mise
en scène Didier Long avec Lorànt Deutsch, Stéphane Guillon, Éric
Metayer, Marie Bunel, Urbain Cancelier, Sophie Barjac, Stéphane
Caillol, Philippine Bataille.
À la mort de Louis XIV, le jeune roi Louis XV n’est encore qu’un
enfant. Dans son testament, le Roi-Soleil a limité les pouvoirs
de Philippe d’Orléans, fils de Monsieur, qui s’empresse de faire
casser une volonté qui le prive de ses prérogatives. Le parlement
approuve sa requête. Celui que l’on nommera désormais le Régent,
trouve un royaume en guerre avec la plupart des pays d’Europe et,
économiquement, au bord de la faillite. Élevé par l’abbé Dubois
qui sera son conseiller durant toute sa vie, le Régent, très critiqué
pour ses penchants libertins, est un homme intelligent, cultivé,
doté d’une excellente capacité de travail. Peu gâté par sa famille,
Louis XIV lui a imposé comme épouse l’une de ses filles bâtardes
qu’il a reconnue. Sa mère, la princesse palatine, a peu de considération
pour lui. Il est également entouré par une noblesse jalouse de ses
prérogatives qui, de génération en génération, ne cesse d’intriguer,
de comploter, de saper les réformes royales, ce qui mènera le royaume
à la révolution.
Lorsque John Law, forçant sa porte, parvient à lui exposer son projet,
le Régent voit en lui un moyen de sortir la France d’un désastre
annoncé, même si l’idée novatrice le dépasse un peu. L’écossais
vient en effet de concevoir un « système » économique révolutionnaire,
la création d’une banque qui émettra du papier-monnaie dont la valeur
est basée sur le cours de l’or et de l’argent, la Banque prêtant
à l’État le métal récolté. La Banque Générale qui deviendra Banque
Royale en 1718 est née. Ce principe astucieux, basé sur la confiance,
fonctionne dès le début de sa création, les spéculateurs voyant
leur investissement rapporter. L’économie redémarre, le niveau de
vie s’élève. Mais le « système » a ses limites, la banque ne pouvant
faire face à une éventuelle demande de reconversion des billets
si la fameuse confiance a tendance à flancher. John Law a alors
une autre idée: acheter et exploiter les terres de la Louisiane,
et créer la Compagnie de l’Occident (qui deviendra par la suite
la Compagnie des Indes). Law prend alors une importance qui inquiète
ministres et princes. Ceux-ci voient leur influence et leurs privilèges
en danger. L’abbé Dubois, animé par l’ambition de devenir archevêque,
considère Law comme un adversaire encombrant. On s’interroge aussi
sur les réelles capacités des mines du Mississipi. Une cabale menée
par les princes de Condé et Conti qui, du jour au lendemain, réclament
la reconversion de leurs billets, précipite la banqueroute. C’est
l’émeute. Le régent n’a d’autre solution que de renvoyer Law qui
finira sa vie à Venise.
Après Le Diable rouge (Lettre 288), Antoine Rault
nous revient avec cette pièce passionnante. Il expose clairement
le principe révolutionnaire de Law qui plût tellement au Régent
qu’il songea par la suite à le rappeler. Le choix des comédiens
est judicieux. Tous mènent tambour battant une action qui ne faiblit
pas un instant, grâce à l’efficacité de la mise en scène et à des
décors très mobiles qui suggèrent bien les différents lieux. Théâtre
Antoine 10e.
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