SCHWEYK

Article publié dans la Lettre n° 244


SCHWEYK de Bertolt Brecht. Traduction Louis-Charles Sirjacq. Mise en scène Jean-Louis Martinelli. Musique Hanns Eisler. Adaptation musicale Rodolphe Burger avec Jean-Pierre Bacri, Vincent Bonillo, Brigitte Boucher, Elsa Bosc, Elise Caron, Samuel Carneiro, Pierre Hiessler, Bernars Nissille, Grégoire Oestermann, Jean-François Perrier, Julie Recoing.
A Berlin, Adolf Hitler se félicite de l'avancée de ses troupes en Europe. Mais s'il s'interroge sur l'amour que lui porte son peuple, à Prague, occupée par les allemands, on l'apprécie beaucoup moins. Les clients de l'auberge « Le Calice » sirotent leur bière en se taisant ou en pesant chacun de leurs mots. « Bois ta bière et pas de politique » est la devise des lieux, car par les temps qui courent, il vaut mieux courber l'échine. Chacun se débrouille avec le marché noir pour survivre, monsieur Baloun surtout, qui se damnerait pour un morceau de viande. Schweyk, le marchand de chiens, prend les choses avec philosophie. Un bon mot, une anecdote qui apporte à tous la nostalgie d'un passé heureux, sont sa manière à lui de résister. Mais si son verbiage amuse les copains, il déstabilise l'occupant. Débile, comme il le fait croire, ou malin, là est toute la question. Pour offrir à Balun son fameux petit morceau de viande contre un serment, Schweyk va prendre des risques qui le mèneront sur le front russe.
Lorsqu'il rédigea sous forme de feuilletons durant la Première Guerre Mondiale les Aventures du brave soldat Chvéïk, l'auteur tchèque Jaroslav Hasek n'imaginait pas que Bertolt Brecht, en exil aux États-Unis, adapterait en 1942 l'histoire de son héros en comédie musicale, Schweyk dans la Seconde Guerre Mondiale, en collaboration avec Hans Eisler pour la musique et les chants. Même si cette oeuvre n'a pas l'envergure politique et sociale des autres, elle reflète bien l'esprit de l'auteur et le contexte de l'époque, à travers les aventures de Schweyk, personnage comique et tragique à la fois, pris dans la grande tragédie de la guerre, prêt à défendre les petits et les opprimés en se jouant de l'autorité.
Le grand plateau du théâtre reçoit particulièrement bien la mise en scène ludique de Jean-Louis Martinelli qui multiplie les changements de lieux au moyen de décors astucieux. Les comédiens chanteurs animent les péripéties avec art, grâce aux dialogues savoureux entrecoupés de chansons émouvantes. Jean-Pierre Bacri est Schweyk. Sa présence et son formidable naturel, lui permettent d'exprimer toute l'ambiguïté de son personnage. Grégoire Oestermann lui donne la réplique avec talent. Même si le spectacle semble s'étirer parfois, on est séduit par l'ampleur de la tâche où tous se donnent pleinement. Théâtre Nanterre-Amandiers 92. Lien : www.nanterre-amandiers.com.


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