SAHAR & JÉRÉMY
Article
publié exclusivement sur Interrnet avec la Lettre
n° 365
du
3 mars 2014
SAHAR & JÉRÉMY. Texte d'Aurore Auteuil.
Mise en scène Ladislas Chollat avec Aurore Auteuil.
Le rêve américain de Jérémy c'était Paris. Alors à dix-sept ans,
il a fermé la porte sur son enfance de pauvre, sur sa famille et
surtout sur son père et ses coups de poing. Il a quitté Villeneuve-sur-Lot,
sa ville natale, est monté dans un train et s'est retrouvé à Bobigny
où il a continué de faire ce qu'il avait toujours fait, boire pour
oublier ce sur quoi il avait refermé sa porte. Un an plus tard,
par un jour d'été, ses yeux ont croisé ceux de Sahar, des «
yeux de tendresse » dans lesquels il a plongé. Sahar signifie
lever du jour. Il avait dix-huit ans, elle en avait vingt-six. Pour
Jérémy, ce pouvait être le lever d'un jour meilleur, oublier enfin
cette enfance qu'il traînait comme un boulet, devenir quelqu'un.
Alors « il s'est envolé » avec elle. Deux ans plus tard,
il lui a demandé sa main et lui a fait un enfant. Devenu père d'une
petite Romy, il s'est mis à travailler. Comme le disait Sahar, «
on ne sauve pas les gens d'eux-mêmes mais cela vaut le coup d'essayer
». Durant six ans, il a vraiment essayé « d'être »,
mais cela ne lui en a donné que l'illusion. Alors Sahar a baissé
les bras. Ce fut la rupture puis de brèves retrouvailles autour
d'un sapin de Noël, le jour de l'anniversaire de Jérémy. Ce fut
l'illusion que tout était encore possible. Mais comme le dit Sahar,
« on ne sauve pas les gens d'eux-mêmes », surtout lorsqu'ils
amorcent leur descente aux enfers.
En six chapitres et seize ans de vie, Aurore Auteuil raconte avec
beaucoup de poésie la rencontre improbable entre un jeune garçon
de café et une jeune fille qui vient de loin et qui, ensemble, s'acharnent
à s'aimer alors que tout les sépare. Un texte bouleversant, très
écrit, où l'émotion perce à chaque détour de phrase grâce au talent
de comédienne de l'auteure.
Le nom de Ladislas Chollat évoque le succès de nombreuses mises
en scène mais remémore surtout sa première pièce Je ne serai
pas au rendez-vous (Lettre 337) dont l'un des thèmes
et la mise en scène mobile et très fluide ont quelques points communs.
Il s'agit là d'un superbe travail d'équipe qui associe au texte
et à la mise en scène, la chorégraphie, la lumière, la vidéo et
le superbe graphisme d'Emilie Chollat. Un récit simple, triste,
empreint d'authenticité, à ne pas manquer. Théâtre du Petit Hébertot
17e.
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