LA RAFLE DU VEL D'HIV

Article publié dans la Lettre n° 220


LA RAFLE DU VEL D’HIV d’après les romans de Maurice Rajsfus. Adaptation Philippe Ogouz. Mise en scène Frédéric de Rougemont et Philippe Ogouz avec Philippe Ogouz et Marian Courcel (à l’accordéon).
1942, Maurice a quatorze ans. Pour son âge, il est plutôt petit, sans duvet au menton, cela le désole un peu. Mais qu’il est bon d’être dans les jupes de maman et sur les genoux de papa. Dans le lycée qu’il fréquente à Vincennes, il y a le lot habituel des professeurs indifférents, remarquables et tyranniques. Il chante « Maréchal nous voilà» et rêve d’une bicyclette. Enfin, il est un petit garçon comme les autres jusqu’au jour où sa mère doit coudre, selon des règles très strictes, des étoiles jaunes sur tous leurs vêtements. Alors il est juif. Cette évidence, cette différence, le rattrapent. Il arrive dans la cour du lycée et ses copains crient «vive le shérif». Au petit matin du 16 juillet 1942, la police française vient arrêter toute sa famille. Pourquoi? Ils n’ont rien fait de mal. Ils sont parqués au vélodrome d’hiver. Ce lieu de rêve sportif, le Vel d’Hiv où se déroulent les six jours, devient une antichambre de cauchemar et de mort pour 12 000 juifs dont 5 000 enfants. Maurice et sa soeur doivent leur vie à la présence d’esprit de leur mère. Le petit Maurice a grandi d’un coup mais toute sa vie, il sera amputé de son adolescence et de ses parents.
Philippe Ogouz a réalisé une remarquable adaptation de trois livres de Maurice Rajsfus «Opération étoile jaune», «La Rafle du Vel d’Hiv» et «Chronique d’un survivant». La force du spectacle est son côté ludique apporté par les réflexions de Maurice qui nous font sourire. Bien sûr, on a la gorge nouée d’émotion et d’indignation par cette Saint-Barthélemy de la police de Vichy. La sobriété de la mise en scène, jouant avec des lumières astucieuses, nous jettent dans l’aube blafarde de la rafle. Un rectangle de lumière projeté sur le mur nu sera tout à tour un tableau noir, une fenêtre ou un portrait. La danse des lumières nous jette dans la tourmente. Il y a ce moment saisissant où Maurice colle sur le mur des rectangles de papier blanc figurant les photos des instigateurs de la rafle, Laval, Bousquet, le général Oberg et autres infâmes. Frédéric de Rougement a été l’oeil pour la mise en scène et les lumières. Marian Courcel a composé et interprète sur scène une musique originale qui accompagne la complainte du petit Maurice. Ce spectacle bouleversant d’humanité est interprété magistralement par un comédien que l’on respecte pour son talent et son courage. Philippe Ogouz nous livre un témoignage que l’on doit transmettre. Lavoir Moderne Parisien 18e (01.42.52.09.14).


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