PLUIE D'ENFER
Article
publié dans la Lettre n° 324
du
21 mars 2011
PLUIE D’ENFER de Keith Huff. Mise
en scène Benoît Lavigne avec Olivier Marchal, Bruno Wolkowitch.
Copains depuis leur plus tendre enfance, Denny et Joey sont comme
les deux doigts de la main. Devenus policiers, ils font équipe comme
lorsqu’ils étaient gosses, l’un costaud et bourré de principes,
l’autre plus calme, plus introverti. Ils patrouillent nuit et jour
dans les quartiers chauds de Chicago. Tout est bon pour leur refuser
le grade de lieutenant auquel ils estiment avoir droit. Leur dossier
est lourd de quelques blâmes. « Il y a du racisme à l’envers», juge
Denny, furibond. La pluie d’enfer qui s’est abattue ces dernières
semaines sur la ville va balayer leur vie et Denny qui a toujours
voulu tout contrôler ne contrôlera plus rien. L’avis plus lucide
de Joey ne lui servira pas: « T’es pas Dieu. T’es pas son pote,
à Dieu. Tu peux rien faire, putain ». Puis les beaux jours reviendront.
Ils s’ouvriront sur des lendemains plus paisibles, avec au bout
la rédemption, même si elle a été acquise grâce à quelque chose
qui ressemble à de la trahison. « C’est fou ce qu’il faut perdre
pour en arriver là ».
J’ai écrit un film d’action destiné à la scène commente l’auteur
américain Keith Huff qui semble avoir une profonde connaissance
des bas-fonds des villes américaines et de la faune sordide qui
les habite. Il raconte sans fard et sans concession le monde impitoyable
de la prostitution, de la drogue et des déviants et s’attarde sur
un autre plus dramatique encore, celui des assassins, monstres anonymes
noyés dans la masse, qui assouvissent leurs instincts les plus barbares
au nez et à la barbe des policiers qui n’ont pas su les détecter.
Benoît Lavigne met brillamment en scène, à la manière d’un fulgurant
thriller, le parcours dantesque de policiers ordinaires, celui de
deux hommes qui, en deux monologues parallèles restituent, selon
leur point de vue, leur version des événements, et leur vertigineuse
descente aux enfers.
Le décor très astucieux, deux plans inclinés, suggèrent parfaitement
les différents lieux soulignés par des jeux de lumières suggestifs,
simulant la pluie diluvienne ou les gyrophares, accompagnés par
une musique de jazz, de hip-hop ou autres...
La mise en scène s’appuie entièrement sur le jeu des deux comédiens.
Le passé de policier de l’un, les nombreux rôles de flic de l’autre
les aident certainement à trouver le ton. Olivier Marchal et Bruno
Wolkowitch sont fantastiques. Naturels et émouvants, ils vivent
et font vivre littéralement le parcours ahurissant des deux hommes,
comme s’ils l’avaient eux-mêmes éprouvé. La Pépinière Théâtre
2e.
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