PARCE QUE JE LA VOLE BIEN
Article
publié dans la Lettre n° 326
du
2 mai 2011
PARCE QUE JE LA VOLE BIEN de Laurent
Ruquier. Mise en scène Jean-Luc Moreau assisté d’Anne Poirier-Busson
avec Catherine Arditi, Ariel Wizman, Armelle, Jacques Ramade, Olivier
Pajot, Bertrand Degremont
Prenez le protagoniste d’un fait divers qui aurait pu le rester
si ce n’était la vertigineuse fortune de celui-ci et l’importance
qu’elle représente pour l’État, changez le nom des intéressés et
vous possédez l’idée d’une comédie bien ficelée.
Une vieille dame, milliardaire, n’a qu’un seul souci, l’ennui. Rien
de plus déprimant que la monotonie des jours qui s’écoulent. Un
homme, le fils qu’elle aurait souhaité avoir, entre alors dans sa
vie et se charge de la distraire un peu. Il devient son meilleur
ami. L’art est son métier. Très cultivé, il possède un atout de
taille : l’humour. Quel remède à la morosité ! La vieille dame ne
jure plus que par lui, le comble de cadeaux, l’abreuve de chèques
et de liasses de billets. Vingt ans plus tard, alors qu’elle songe
à en faire son légataire universel, sa fille unique s’émeut de ces
libéralités à l’égard d’un ami qui ne lui veut que du bien,
plutôt des biens, précise-t-elle, car sa mère représente
tout de même la troisième fortune féminine mondiale. Ce à
quoi il rétorque: « Voilà bien la preuve que je ne suis pas intéressé,
sinon, je serais allé voir les deux premières » ! Que faire, face
à cette hémorragie du patrimoine maternel ? Là est la question !
Si le sujet d’une œuvre théâtrale demande de l’imagination et du
talent, l’exploiter lorsqu’il s’inspire d’un fait avéré est plus
délicat. Le jeu consiste à flirter avec la réalité tout en ayant
la finesse d’en modifier les péripéties. Laurent Ruquier est passé
maître dans cet art. Semblable pièce doit durer juste le temps d’amuser
sans lasser. Pas de longueur donc, pas de temps morts. Là aussi
notre auteur est à son affaire car il s’est allié à l’incontournable
Jean-Luc Moreau dont la mise en scène trépidante en tire le meilleur
parti. Reste le décor qui, très imagé, est d’une redoutable efficacité.
Détourné du slogan publicitaire d’une marque célèbre qui se serait
certainement fort bien passé pour une fois de publicité, son titre
donne à la fois à la pièce son sens et le ton. Le jeu de mot est
un peu facile mais encore fallait-il le trouver ! Les bons mots,
notre auteur en use, en abuse même quelquefois, au risque de faire
de ses répliques une suite de réparties un peu mécaniques, mais
les comédiens dont le phrasé et la diction sont parfaits, parviennent
à les échanger comme s’ils coulaient de source. A cet égard, leur
talent est confondant car rien n’est plus difficile que de faire
mouche dans ce cas et tous y parviennent malgré la difficulté que
représentent également pour eux les nombreux changements de costumes,
cerise sur le gâteau de cette comédie, qui emporte les spectateurs
dans l’engrenage d’un rire continu, ponctué de « oh » entendus et
d’applaudissements nourris.
Chansonnier se produisant souvent en tournée, animateur de radio
et de télévision, auteur d’un nombre notable de pièces toutes portées
à l’affiche, adaptateur de comédies musicales, producteur de spectacles,
Laurent Ruquier est partout, touche à tout avec une incomparable
virtuosité. Une question : Quand dort-t-il ? Théâtre Saint-Georges
8e. Lien : www.theatre-saint-georges.com.
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