PAR-DESSUS
BORD
Article
publié dans la Lettre n° 285
PAR-DESSUS BORD de Michel Vinaver.
Mise en scène Christian Schiaretti avec trente comédiens dont Olivier
Balazuc, Philippe Morier-Genoud, Guesch Patti, Dimitri Rataud et
les musiciens de l’Ensemble In & Out.
Un événement. La pièce fleuve de Michel Vinaver est jouée dans son
intégralité. Ecrite entre 1967 et 1969, elle dure presque six heures.
En 1973, Roger Planchon monte une version courte. Christian Schiaretti
décide de monter la pièce d’un des auteurs les plus importants de
la langue française. Malgré le titre, il ne s’agit pas d’une pièce
maritime même si elle dépeint un naufrage industriel. Ravoire
et Dehaze est une entreprise familiale, numéro un français du
papier toilette. Le monde est impitoyable et les américains battent
en brèche ce bastion national. Un accident cardiaque terrasse le
directeur. Ses fils prennent le commandement. C’est Dallas au royaume
du PQ ! Bouleversement dans les vieilles habitudes, on rénove, on
change, on modernise. Le changement radical des mentalités et des
destins de tout le personnel de l’entreprise est analysé, observé
par Jean Passemar, cadre administratif. Sa véritable ambition est
d’écrire pour le théâtre. Jean écrit une pièce faisant fi de toutes
les règles raisonnables pour avoir une chance qu'elle soit représentée.
Elle est très longue, trop de personnages, des musiciens et mille
actions qui se croisent.
Michel Vinaver connaît bien le monde de l’entreprise. Son regard
aigu, mâtiné d’un cynisme clairvoyant, décrypte en six mouvements
la tragi-comédie de cette entreprise. Le style vif de Michel Vinaver,
son humour pointu nous livrent des scènes hilarantes de la comédie
humaine et de ses petites lâchetés dans cette course au pouvoir.
Christian Schiaretti fait un vrai spectacle de théâtre public, osant
la durée, la multitude de comédiens et mettant en œuvre une grande
machine théâtrale. Les décors de Renaud de Fontainieu et Fanny Gamet
sont très astucieux, de l’univers d’une vieille entreprise dont
les murs sont des cartons empilés, au coup de jeune voulu par les
héritiers qui poussent les murs pour laisser la place à des panneaux
aux couleurs psychédéliques. Les costumes nous plongent dans les
années 70. Peut-on parler d’une mise en scène ? Il serait plus juste
de parler d’une formidable chorégraphie orchestrée de main de maître.
Aucun temps mort, beaucoup de rires pour ce spectacle choral où
les histoires qui se croisent, se percutent, se bousculent comme
des boules de billard nous passionnent. La distribution est étonnante.
Olivier Balazuc (Jean Passemar) est fantastique en petit « fonctionnaire »
qui observe ce grand bal des vanités. Guesch Patti chante, bien
sûr, mais joue et danse avec le même talent impertinent qui est
son apanage. Philippe Morier-Genoud tient le rôle d’un professeur
d’obscurs textes mythologiques, offrant des scènes hilarantes. Par-dessus
bord dans son intégralité était un vrai défi. Il est relevé
avec talent par Christian Schiaretti. Il est possible de voir le
spectacle dans son intégralité ou en deux soirées. Le public est
d’ors et déjà au rendez-vous. Théâtre National de la Colline
20e.
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