OXU
Article
publié dans la Lettre n° 313
OXU. Spectacle de et avec Jean-Claude
Leguay, Christine Murillo, Grégoire Œstermann d’après Le Baleinié.
Scénographie Jean-Pierre Larroche. Lumière Alain Poisson.
Le Baleinié est le dictionnaire des tracas que Jean-Claude
Leguay, Christine Murillo et Grégoire Œestermann ont écrit. « Oxu
» est un mot du Baleinié : Oxu (o-gzu) : « n.m. Objet qu’on
vient de retrouver et que l’on reperd aussitôt ». Pourquoi « oxu
» ? Parce que « souffrir avec précision, c’est mieux savoir vivre
mal ! ».
Toutes ces précisions permettent de vous mettre tout de suite dans
le bain car Oxu, c’est aussi trois acteurs qui vont et viennent
sur scène au milieu d’un capharnaüm saisissant dont le comportement
peut surprendre. Oxu c’est en effet 81 peaufinages de définitions,
56 recherches de mots qu’ils vont vous faire partager tout en
vaquant à leurs occupations. Oxu, c’est aussi un lustre :
En équilibre très instable sur le coin supérieur d’un escabeau,
Christine y est suspendue par le bras pendant que ses deux compères
font leur entrée, un linot roulé sur l’épaule. Tout en essayant
de la libérer de cette position pour le moins instable, ils s’affairent
et la conversation s’engage car oxu c’est aussi des tranches
de vie : « C’est quoi ton dernier meilleur plus mauvais souvenir
? ». « Offrir le même cadeau… mais en moins bien ». « Tartiner du
beurre sur une tranche de pain de mie » retient aussi toute leur
attention. Tranche de pain de mie ou biscotte ? Pas si simple !
Un mot en amène un autre. Comment trouver la bonne définition ?
Voyez miouter (pardon, je n’ai pas le dico pour vérifier
l’orthographe) : mourir en vacances, ou partir pour une fois
en avance et mourir en chemin ? Ils répètent, triturent, ajoutent,
retranchent, peaufinent tous les termes de la définition pour parvenir
à la plus exacte possible. Entre deux occupations, ils remémorent
les phrases qu’ils auraient aimé prononcer. « C’est un peu large,
vous l’avez en 34 ? », celles qu’ils auraient aimé entendre : « laisse,
je vais débarrasser » ou celles qu’ils n’ont jamais dites : « c’est
la providence qui vous a jeté sur mon chemin », celles enfin qu’ils
n’aimeraient pas entendre : « alors on n’a pas mangé sa petite compote
ou pire : « tu crois qu’il nous entend ? ». Toutes ces cogitations
leur donnent très faim mais ils diffèrent l’instant car, selon eux :
« il n’est pas encore très vieux ». Oxu, c’est aussi un carton
: Ils tournent un bon moment autour de l’emballage avant d’en
extraire l’appareil qu’ils viennent d’acheter, un Mohodi A 140,
SGDG « sans garantie du gouvernement » dont ils vous expliqueront
l’usage lorsqu’ils auront déchiffré le mode d’emploi du montage.
Elle, affublée d’une robe aux poches plaquées aussi multiples que
superfétatoires, eux habillés à la diable d’un bleu de travail gris
ou d’un pantalon rouge, Christine Murillo, Jean-Claude Leguay et
Grégoire Œstermann nous ébaudissent. Leur débit aussi régulier qu’impressionnant
et leur adresse verbale sont étourdissants. Leur naturel aussi est
confondant. En les écoutant deviser sur scène, on les croirait plutôt
installés chez eux. Et comme Oxu c’est aussi trois instruments
à vent et trois guitares, ils nous gratifient de quelques chansons
pas tristes qui sentent le vécu ! « Je ne comprends pas, ils étaient
formidables l’année dernière». Ça, je n’aimerais pas qu’on me le
dise », confie l’un d’entre eux à la fin du spectacle. Aucune crainte,
ils peuvent en être sûrs. Cela, personne ne le leur dira ! Cliquer
ici pour voir un visuel de la pièce. La Pépinière
théâtre 2e.
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