LA NUIT DES OLIVIERS

Article publié dans la Lettre n° 237


LA NUIT DES OLIVIERS d’Eric-Emmanuel Schmitt. Mise en scène Christophe Lidon avec Frédéric Quiring.
« Israël est une terre d’oliviers, de cailloux, d’étoiles et de bergers, une terre où les dattes sèchent sur la paille des greniers, une terre d’angoisse où les coeurs mûrissent dans l’attente du sauveur, une terre d’orange, de citron et d’espoir. Israël est mon jardin, le jardin où je suis né, ce jardin même où je vais mourir. Dans quelques heures, ils vont venir me chercher. Déjà ils se préparent».
Ainsi commence, de la plus belle des façons, la« confession d’un condamné à mort le soir de son arrestation », pas de n’importe quel condamné puisqu’il s’agit de Yéchoua, ce magicien de Nazareth, dont le corps enseveli après avoir été crucifié, va trois jours plus tard ressusciter dans toute sa splendeur. Eric-Emmanuel Schmitt se risque à parler à la première personne, à prêter ses mots et sa pensée à Jésus, Fils de Dieu. Dès les premières phrases de ce prologue qui précède l’Evangile selon Pilate, le lecteur, pris par la beauté du style et de la langue du conteur, se trouve transporté là-bas, témoin de l’enfance, de la jeunesse et des derniers moments de la vie de Yéchoua.
Les quelques phrases rapportées ci-dessus ne sont pas prononcées sur scène. Elles servent simplement à tenter de restituer l’atmosphère délicate et intime, presque magique qui se dégage du lieu. L’auteur a adapté le prologue exactement de la même manière qu’il l’a fait pour l’Evangile selon Pilate, choisissant les moments les plus forts et les plus frappants afin d’illustrer ce qu’il croit avoir été le parcours terrestre du fils de Dieu. Au centre l’amour, non l’amour de soi mais celui des autres dont la découverte l’orientera sur ce qu’il doit faire en dépit des lois. Puis cette chute immobile à l’intérieur de lui-même, superbe oxymore, qui lui donne la certitude qu’il a « quelque chose de bien à faire » et qui le pousse à faire le pari de croire en lui, quoiqu’il lui en coûte. L’interprétation de la vie de Jésus puis de celle de l’enquête de Pilate sont le fruit de la réflexion et des recherches d’un philosophe qui fait simplement part de sa propre foi.
Surprenant souvent, dérangeant parfois, on reste extérieur ou on adhère à cette réflexion, pris par l’émotion créée par le jeu simple et très émouvant de Frédéric Quiring, Yéchoua humain et bouleversant qui se livre sans apprêt grâce à la mise en scène et au décor, là aussi très sobres, de Christophe Lidon et de Claude Lemaire. Petit Montparnasse 14e.


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