NI DIEU NI DIABLE

Article publié exclusivement sur Interrnet avec la Lettre n° 374
du 17 novembre 2014


NI DIEU NI DIABLE. Texte d'Augustin Billetdoux d'après Les Deux Etendards de Lucien Rebatet. Mise en scène Julie Duquenoy avec Lou de Laâge, Clément Séjourné, Damien Zanoly, Mathieu Graham, Ariane Brousse, Pierre Vos.
Celui qui croyait au ciel, celui qui n'y croyait pas, Régis, Michel. Anne-Marie rêvait de pureté, Yvonne ne demandait qu'à la perdre …
Anne-Marie et Régis ont connu leur « Nuit de Brouilly », nuit de mysticisme exacerbé qui leur a entrouvert des sentiers de pureté inouïe et les a surtout plongés, au seuil de leur engagement imminent de prêtre et de clarisse, dans un brouillard de fanatisme contre nature. Michel, l'ami d'enfance de Régis, n'y voit qu'une insupportable escroquerie, tissée en toute perversité par le directeur de conscience, qui assoit ainsi son pouvoir malsain. Michel, paillard mécréant, s'attachera à détricoter la supercherie, mais en y brûlant ses ailes inopinément amoureuses. Flambée des regards, gesticulation de l'amour, tout un lot de questions sans réponses sinon celles de la souffrance et de la désertion. La chasteté est-elle la condition de l'amour ? Le désir et son assouvissement ne sont-il pas la seule transgression admissible ? Le simple bon sens des corps peut-il lutter contre l'abus de confiance, l'endocrinement, les mensonges hystériques, les fausses puretés ? Nulle amnistie, une confession frelatée, le non-choix d'un « faute-de-mieux », chacun retournera à l'impossibilité du dépassement.
Deux Narrateurs tiennent les couples dans le faisceau de leurs couplets alternés, dansent et chantent au gré des époques et des lieux. Anne-Marie, - lumineuse Lou de Laâge -, se donne avec une innocence intacte aux excès de sa pureté adolescente comme à ceux de son émerveillement de la chair. Régis fouaille les cœurs en faisant mine d'épargner les sens, sa duplicité jésuitique en sortira à peine écornée. Malgré son humour rageur, Michel ne parviendra pas à protéger sa révolte, à laquelle Clément Séjourné confère une vigueur jubilatoire jusque dans la meurtrissure.
La mise en scène est nerveuse et intense, vrillée d'éclats de rire et de souffrance, scandée de monologues dont la modernité ne peut qu'interpeller en nos temps de fanatisme et d'hystérie. Un bien beau spectacle. A.D. Théâtre du Lucernaire 6e.


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