LE
NEVEU DE RAMEAU
Article
publié dans la Lettre n° 304
LE NEVEU DE RAMEAU d’après Diderot.
Mise en scène Jean-Pierre Rumeau. Adaptation Nicolas Vaude, Nicolas
Marié, Olivier Baumont avec Nicolas Vaude, Nicolas Marié, Olivier
Baumont ou Bertrand Cuiller (clavecin).
Un philosophe remémore sa rencontre au célèbre Café de la Régence
avec un personnage singulier, jeune homme excentrique, provocateur
et marginal qu’il voit « composé de hauteur et de bassesse, de bon
sens et de déraison ». Il a un patronyme si difficile à porter qu’il
ne le supporte pas : son oncle n’est autre que Jean-Philippe Rameau
dont la notoriété lui porte ombrage. L’ entretien a l’apparence
d’une conversation rapportée par le philosophe-narrateur. Les deux
hommes parlent de sujets divers: de l’éducation, de la place de
l’homme de génie dans la société, de la musique, mais cette discussion
à bâtons rompus est centrée sur un thème cher à Diderot, celui de
la morale. Le philosophe fait parler Jean-François Rameau, le neveu.
Face à celui qui lui présente une vision matérialiste et cynique
de la vie, le philosophe lui impose une vision immorale mais cynique
de la vérité. Leur conversation est ponctuée par les notes d’un
clavecin.
Ce dialogue philosophique satirique écrit par Diderot sur plusieurs
années, entre 1762 et 1773, resta méconnu jusqu’à la mort de l’auteur.
L’ écart entre la réflexion philosophique et la réalité quotidienne
sur le sens de la vie, par l’intermédiaire de deux êtres aussi particuliers
et dissemblables, est difficile à adapter pour la scène. Une phrase
pourtant en a été le déclencheur: « On doit supposer que les
interlocuteurs sont entrés dans un café où il y avait un clavecin ».
Cette didascalie qui figurait dans une édition de 1863 du Neveu
de Rameau, a largement inspiré l’adaptation et la mise en scène
de l’œuvre originale de Diderot. Créé il y a huit ans dans le même
théâtre, Le neveu de Rameau avait réuni l’esprit aussi brillant
que créateur de quatre personnes et révélé au public le talent d’un
jeune comédien. Nicolas Vaude, plus mûr aujourd’hui, confirme et
parfait ce talent exceptionnel dans une interprétation fulgurante
de Jean-François Rameau, neveu tour à tour extravagant, insolent,
rempli de contradictions. Il est entouré par Nicolas Marié, remarquable
narrateur-philosophe cynique et débonnaire et par Olivier Baumont
ou Bertrand Cuiller qui portent littéralement la conversation en
l’accompagnant des différentes partitions musicales, essentielles
pour agrémenter un texte qui se prête pourtant peu au théâtre. Théâtre
le Ranelagh 16e.
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