MOI, MOI & FRANÇOIS B.

Article publié dans la Lettre n° 400
du 10 octobre 2016


MOI, MOI & FRANÇOIS B. de Clément Gayet. Mise en scène Stéphane Hillel avec François Berléand, Sébastien Castro, Constance Dollé, Inès Valarcher, Clément Gayet.
Insensée cette comédie mais jubilatoire !
François B. attend avec impatience le taxi très en retard qui doit l’emmener au Théâtre Montparnasse où il joue Dom Juan et…il reprend conscience dans une pièce sans porte ni fenêtres, manifestement inoccupée, qui semble être une agence de voyages, au vu des affiches. Sous les toiles en plastique gisent quelques meubles et un humain, comme lui, enfermé là. L’homme se présente : « Vincent, auteur dramatique ». François fait de même : « François Berléand ». C’est superflu, l’auteur le connaît. Il semble d’ailleurs beaucoup moins surpris que le comédien de se trouver là et, surtout, il est manifestement heureux de le rencontrer. Il lui dit combien il l’apprécie, à tel point qu’il lui a fait parvenir il y a six mois le tapuscrit d’une pièce dont il n’a aucune nouvelle. François ne comprenant pas du tout ce qui lui arrive, préfère ne pas contrarier son interlocuteur. Il joue la surprise et met cet oubli sur le compte de son agent. La conversation s’engage, les questions de François sont aussi légitimes que les réponses de Vincent sont lacunaires. Leur face à face est interrompu par les allées et venues de Cézanne, une jeune fille bizarrement vêtue et qui fait tout aussi bizarrement son office de domestique…
« Fictionnellement aspiré » par le cerveau de Vincent, François B. tente de comprendre puis d’amadouer son « kidnappeur ». Temporisation, promesses et menaces jalonnent un huis-clos auquel va se joindre Cécile, l’épouse de François, ce qui ajoute une note vaudevillesque hilarante. L’arrivée de l’auteur lui-même au dernier acte, devrait les « délivrer » de ce cauchemar ubuesque, mais ce n’est pas si simple !
Clément Gayet surprend et divertit, égratignant au passage les petits défauts de la profession, des comédiens et des auteurs. Il y réussit pleinement car la succession des événements est d’une logique implacable et les comédiens jouent leur rôle avec un naturel confondant. Le public perd peu à peu ses repères de spectateur lambda pour plonger dans le feu d’une comédie hors norme et déstabilisante. Il passe par tous les états, de l’ébahissement au fou rire. Une mention pour les décors. Certains accessoires dans l’appartement de François renvoient astucieusement au décor de l’agence. Un satisfecit pour l’accoutrement de Cézanne dont on applaudit la prestation de « femme modulable ». Inès Valarcher qui interprète ce rôle n’est pas du tout « le brouillon » présenté par Vincent ! Théâtre Montparnasse 14e.


Retour à l'index des pièces de théâtre

Nota: pour revenir à « Spectacles Sélection » utiliser la flèche « retour » de votre navigateur