LE MINISTRE JAPONAIS
DU COMMERCE EXTÉRIEUR

Article publié exclusivement sur Internet avec la Lettre n° 347
du 10 décembre 2012


LE MINISTRE JAPONAIS DU COMMERCE EXTÉRIEUR de Murray Schisgal. Mise en scène Stéphane Valensi avec Marc Berman, Bartholomew Boutellis, William Edimo, Nathalie Grauwin, Daniel Kenigsberg, Nathalie Lacroix, Mathieu Marie, Ariane Pawin, Juliette Savary, Marc Shapira.
Duckpond… tout un programme ! ça barbote, ça grenouille, ça cancane, ça complote…et finalement ça se noie ! Quand les hasards de l'escroquerie à la petite semaine rencontrent la pusillanimité et la cupidité des édiles d'une petite ville de ploucs, la vanité et les appétits divers et avariés concourent à une mystification bien méritée et fort joyeuse pour le spectateur.
Comment, en effet, se prendre d'une quelconque commisération pour ce maire endetté et assoiffé d'un pouvoir au petit pied, et ses acolytes ? La juge est irrémédiablement poivrote, l'égoïsme du médecin n'a d'égal que sa rapacité, la veulerie du policier est à l'aune de son désir insatisfait de faire accepter sa négritude. L'épouse de l'édile est une espèce de dinde décorée comme un arbre de Noël, sa fille se prend pour une passionaria féministe et elle se voit courtisée par les Dupond-Dupont, deux frères à la solde du maire, avant de bêler aux promesses du séducteur aviné.
La basse-cour caquète donc dans l'image d'Epinal, à la perspective de recevoir, -en toute discrétion…-, le Nippon mandaté qui ne manquera évidemment pas de distribuer subsides et prébendes. Et quel Nippon ! Un acteur raté et sa compagne, fauchés et matois, qui profiteront de l'aubaine pour se refaire une petite santé. Ils éructent un japonais de caricature, promettent le paradis du soleil levant, avant de se carapater… à l'anglaise.
Derrière cette farce jubilatoire se profile une cruauté réaliste fondée sur l'observation, sans une ride, des petitesses et mesquineries propres à la nature humaine, toutes époques confondues. Nicolas Gogol revisité par Murray Schisgal américain contemporain. Si le Revizor russe d'il y a presque deux siècles fit grincer les pouvoirs en place, le thème corrosif en est toujours d'actualité. Et les ridicules sombreront immanquablement dans les désillusions et la nuit qui s'étiole sans embellie.
La mise en scène est portée par des acteurs en grande verve et inventivité, qui s'agitent, courent, s'invectivent, s'épient, se répandent, entre les étages, celui-ci, public, des flagorneries, complots et ripailles, celui-là, intime, de la chambre où se révèle l'escroquerie. Farce et force resteront à l'extinction des rêves, à la destruction des châteaux en … Japon. Pour le plus sain rire des spectateurs. Théâtre 13 /Jardin 13. A.D.


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