MARIAGE(S).
HYMENEE. LA NOCE
Article
publié dans la Lettre n° 250
MARIAGE(S). HYMENEE de Nikolaï Gogol
et LA NOCE d’Anton Tchékhov. Mise en scène Anne-Marie Lazarini
avec Judith d’Aleazzo, Bruno Andrieux, Jacques Bondoux, Hervé Bourde,
Jennifer Catelain, Catherine Chauvière, David Fernandez, Dominique
Gras, Claude Guedj, Isabelle Mentré, Michel Ouimet, Dimitri Radochévitch,
Andréa Retz-Rouyet.
Podkoliossine a plus que l’âge de se marier mais prolonge paresseusement
son célibat par crainte de s’engager. Fiokla, la marieuse et Kotchkariov,
son meilleur ami, vont s’employer à lui faire épouser Agafia, fille
de commerçants. Ce conseiller à la cour est un bon parti mais la
jeune fille, dotée et courtisée par plusieurs prétendants, peut
se permettre de choisir. En différant toujours son engagement, le
personnage principal d'Hyménée ressemble à Gogol, retardant
maintes fois le moment d'achever ses pièces. Ecrit de 1833 à 1842,
ce «sujet innocent dont un commissaire de police ne s’effarouche
pas» est la quatrième version de l’auteur qui, perpétuellement insatisfait
de ses œuvres, a l’habitude de les brûler et de les recommencer.
Il la place dans son époque et décrit avec causticité et sans aménité
des personnages petits et mesquins. Pas d’intrigue savamment argumentée,
juste une satire de certaines classes de la société et en particulier
de celle des fonctionnaires que Gogol connaît bien, pour en avoir
fait partie durant sept ans. Il met en relief avec réalisme la médiocrité
des personnages et malmène une institution où les intérêts matériels
dépassent de loin l’expression des sentiments.
La Noce la prolonge subtilement, même si ce lever de rideau
fut écrit un demi siècle plus tard. Podkoliossine, dans la peau
d’Aplombov, se marie. Les boutiquiers substituent les fonctionnaires.
La table est dressée, les convives se montrent bruyants et hâbleurs,
le général, indispensable à toute noce, est présent. Tout le monde
trompe tout le monde. Oeuvre beaucoup plus courte que la précédente,
la dérision et l’ironie qui s'en dégagent ne sont appréciées que
remises dans le contexte de la Russie de la fin du XIXe. Anton Tchékhov
l’a écrite en quelques heures en pensant aux mariages organisés
dans l’appartement situé au-dessus du sien, loué à cet effet. Fin
observateur de ses contemporains, il n’a eu aucun mal à décrire
un monde qui rejoint celui de Gogol, uniquement préoccupé par l’argent
et les apparences. La satire du mariage cède la place à celle du
banquet, comédie burlesque assez fellinienne, au comique très visuel,
qui ne manque ni de démesure ni de folie. Anna-Marie Lazarini, grande
spécialiste de l’âme russe, restitue avec maestria dans sa mise
en scène, le mode de vie de certaines classes d’une société sur
le déclin. Elle est suivie par des comédiens chevronnés qui passent
avec art d’un rôle à l’autre, servis par des décors très étudiés.
Théâtre Artistic Athévains 11e (01.43.56.38.32).
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