MARIAGE ET CHÂTIMENT de David Pharao. Mise en scène Jean-Luc Moreau avec Daniel Russo, Laurent Gamelon, Delphine Rich, Fannie Outeiro, Zoé Nonn.
Édouard met la dernière main à sa tenue pour assister au mariage de Fred, son meilleur ami dont il est le témoin. Il est préoccupé par la défection de sa femme. Marianne s’apprête à partir, décidée à rendre visite à une amie dans le fin fond de la Beauce plutôt que d’assister à la cérémonie. Sans doute a-t-elle donné à Fred une raison plus aimable que celle qu’elle vient de lui confier, du moins il l’espère. Gabriella, la stagiaire de son cabinet d’architecte, arrive quelques minutes plus tard avec les plans de l’appel d’offre d’un projet d’urbanisme dont elle doit rendre la maquette le soir-même. Impossible d’échapper à l’aide qu’elle lui demande et qui va durer une bonne partie de la journée, la jeune femme recourt sans état d’âme au chantage. Fred survient alors, inquiet du retard de son témoin. Furieux d’apprendre son désistement, sa réaction est aussi démesurée que le mensonge qu’invoque Édouard pour le calmer car, d’une nature très colérique, Fred lui inspire une peur panique. Même très déçu, celui-ci ne peut qu’accepter un impondérable aussi dramatique. Il part, désolé, assurant Édouard de son entier dévouement mais communique la nouvelle à la concierge en quittant l’immeuble ! Pris à son propre mensonge, Édouard vient de mettre le doigt dans un engrenage dont il ne peut arrêter la marche et dans lequel il entraîne son entourage…
Feydeau reste le grand professionnel du mensonge, principal ressort de ses pièces. Suffisamment probable, celui-ci emporte ses personnages dans une suite de péripéties vaudevillesques qui prennent fin joyeusement. La comédie imaginée par David Pharao, très drôle tout au long de la pièce, s’achève tout autrement. Si les répliques et leurs rebondissements déclenchent les rires du public, les conséquences du premier mensonge conduisent à un dénouement dévastateur. Tous les personnages sauf un, jugé trop benêt, sont amenés à mentir. Les comédiens, stimulés par une mise en scène très rythmée, se jouent remarquablement d’un texte subtil sous son apparente légèreté. Le mensonge le plus efficace est celui qui garde une certaine vraisemblance. Mais c’est aussi le recours le plus simple face à ceux que l’on juge incapables d’accepter la vérité. Théâtre Hébertot 17e.