MA VIE AVEC MOZART

Article publié dans la Lettre n° 257


MA VIE AVEC MOZART d’Eric-Emmanuel Schmitt (d’après le roman édité par Albin Michel). Mise en scène Christophe Lidon avec Didier Sandre et en alternance : chant : Françoise Masset ou Cécile Côte, harpe : Christine Icart, Martine Blot ou Françoise de Maubus, clarinette Philippe de Deyne, Laurent Hemeryck ou Francis Prost.
« J’avais quinze ans et j’étais fatigué de vivre ». Qui n’a pas à cet âge désiré mettre un terme à sa vie, glisser doucement vers le néant sans souffrir ? Qui n’a pas souhaité partir afin d’échapper à ce corps trop rond ou trop maigre, enveloppe disgracieuse, visage ingrat que renvoyait impitoyablement le reflet implacable d’un miroir ? Et puis, soudain, la rencontre a lieu : une musique et l’émotion éprouvée qui pénètre tout le corps pour y rester tapie ad vitam aeternam, clé qui ouvre toutes les portes.
Le décor est une page de musique à demi déroulée où s'inscrivent des instants de la vie qui peu à peu s’écoule. Le comédien s’en approche sans bruit puis s’installe afin de raconter sa vie avec Mozart. Tour à tour adolescent de quinze ans, jeune homme de dix-huit, séducteur de vingt, homme de trente, puis de : « trente-cinq ans déjà et je te survis ». A qui s’adresse-t-il ? A celui qui, toutes ces années, lui a permis de ne pas commettre l’irréparable à quinze ans, à celui qui à trente-quatre ans était « déjà encerclé de fantômes ». Cette relation intime entre l’auteur et le musicien, Didier Sandre l’expose simplement, avec cette merveilleuse inflexion, cette diction sans faille qui font sa célébrité. Mais il n’est pas seul. Musiciens et chanteuses chevronnés, jeux de lumières et ballet savant de projections sur la fameuse page l’accompagnent dans ce cheminement personnel, parsemé d'un florilège de quelques-unes des plus belles oeuvres de Mozart.
On ne présente plus depuis longtemps l’auteur de Frederik ou le boulevard du crime (Lettre n°149), Le visiteur (n°149), Variations énigmatiques (n°149), Oscar et la dame rose (n°212), l’Evangile selon Pilate, la Nuit des oliviers (n°237), ou du merveilleux Hôtel des deux mondes (n°163), pour ne citer que quelques-unes de ses oeuvres portées à la scène. La liste n’est pas exhaustive, elle est impressionnante et si la musique sauve du désespoir, Eric-Emmanuel Schmitt ne se doute peut-être pas, qu’à l’instar du grand musicien, les mots et les phrases couchés sur les pages de ses œuvres ont eux-aussi le pouvoir de rendre heureux. Ma vie avec Mozart est peut-être la plus philosophique d'entre elles car elle apporte une formidable bouffée d’humanité, d’espoir et de paix. Elle est en tout cas la plus intime parce qu'il laisse entrevoir un peu de son jardin secret à la faveur de ses réflexions qui coulent et se succèdent, délicieuses « petite musique de nuit non, grande musique de lumière » !
Christophe Lidon, Eric-Emmanuel Schmitt. La rencontre remonte déjà à plusieurs années. Elle n’est pas fortuite, il n’y a pas de hasard. Ces deux-là se comprennent. La complicité et l’entente entre le texte et son écrin ne trompent pas. La mise en scène, inventive et ludique, une fois encore, sonne juste. « Comment peut-on créer si vite un climat, une émotion ? », s’interroge l’auteur à propos de Mozart. La réponse est là : un éternel jeune homme au regard clair et au sourire ravageur, un hymne à la vie et une musique inspirée des dieux. Théâtre Montparnasse 14e.


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