JULES & MARCEL

Article publié dans la Lettre n° 318


JULES & MARCEL d’après la correspondance de Jules Raimu et Marcel Pagnol. Adaptation Pierre Tré-Hardy. Mise en espace Jean-Pierre Bernard avec Michel Galabru, Philippe Caubère, Jean-Pierre Bernard.
En 1929, la rencontre de Marcel Pagnol et Jules Muraire, dit Raimu, fut le début d’une amitié indéfectible malgré les coups de gueules, brouilles et réconciliations qui émaillèrent leurs relations, querelles particulièrement savoureuses dans les nombreuses lettres qu’ils se sont écrites. Car ces deux grands amis s’écrivirent beaucoup et pas toujours pour se congratuler. Plaintes et reproches abondaient en effet dans leur correspondance, missives sur lesquelles se penche Pierre Tré-Hardy aujourd’hui, pour notre plus grand bonheur. S’il « est fâcheux d’être fâchés », ces deux-là en avaient conscience, affairés qu’ils étaient à se disputer puis à se réconcilier comme des gamins. Il ne s’agissait sans doute que d’un jeu, destiné à épicer leurs relations, et dont l’alibi était d’obtenir quelque chose que l’autre refusait de donner. En témoignent ces quelques lignes de Marcel : « Mon cher Jules, il faut que tu sois bougrement fâché avec moi pour ne pas répondre à une lettre injurieuse qui n’avait d’autre but que de commencer une dispute… » ! Jules et Marcel, amis inséparables, dont la collaboration fit et fait encore la joie de plusieurs générations de spectateurs, car les pièces et films de Pagnol dont le héros est Raimu, qui passionnèrent nos aînés, sont devenus des classiques incontournables, une référence aux yeux des jeunes générations. Tout au long de ces échanges animés, s’ébauchent deux caractères bien trempés, irascibles et fantasques, mais au cœur immense. Le choix judicieux opéré par Pierre Tré-Hardy montre à quel point ils s’aimaient et s’admiraient, leur amitié étant devenu le ciment de leur collaboration.
Deux tables et deux chaises suffisent. Jean-Pierre Bernard, indispensable narrateur, a choisi la simplicité pour « mettre en espace » les deux comédiens d’exception qui animent cette correspondance. D’un courrier à l’autre, Michel Galabru et Philippe Caubère se répondent. Ils incarnent ces deux « sudistes » à l’estime réciproque, dont l’accent fleurait bon les herbes de Provence, et se glissent pour quelques instants dans la peau des deux hommes, sans les imiter, en restant eux-mêmes, avec le naturel qui les caractérise. Dans leur bouche, ces échanges épistolaires semblent d’autant plus authentiques que leurs différences de générations et de carrières ressemblent à celles des deux monstres sacrés qu’ils incarnent. A travers eux, ce sont Pagnol et Raimu qui réapparaissent subitement sous nos yeux, aussi vivants sur scène que dans notre mémoire. Théâtre Marigny-Salle Popesco 8e.


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