J'ETAIS DANS MA MAISON ET
J'ATTENDAIS QUE LA PLUIE VIENNE

Article publié dans la Lettre n° 232


J’ETAIS DANS MA MAISON ET J’ATTENDAIS QUE LA PLUIE VIENNE de Jean-Luc Lagarce. Mise en scène Dominique Terrier avec Sophie Amaury, Sophie Caritte, Nirupama Nityanandan, Marie Crouail, Valérie Diome.
Cela commence comme un conte, comme une fable que l’on raconte inlassablement sous l’éclat de la lampe de chevet. Cinq femmes jouent les petits Poucet de la mémoire. Elles sèment les petits cailloux blancs pour remonter le chemin du temps. Dans la maison familiale, elles racontent les moments choisis de leur vie, des moments d’avant, où il était là. Il, le fils, le frère, le neveu. Il, qui est parti en rupture paternelle et qui revient pour un dernier et éternel séjour. Ces Pénélope du souvenir refont inlassablement point par point, mot par mot, la grande tapisserie de leur vie.
Dominique Terrier a créé le chantier Lagarce avec son équipe, se proposant de « poser ses valises chez un auteur », explorant tous les écrits de Jean-Luc Lagarce, ayant accès à des documents privés, autant de clés sur l’oeuvre de cet homme de théâtre trop tôt disparu. Dominique Terrier creuse les textes jusqu’à l’intimité de l’écriture. Ces textes offrent aux comédiennes un vaste champ d’investigation des émotions. Ici, les cinq femmes n’ont pas de prénom mais des fonctions: la plus vieille, la plus jeune, la mère, l’aînée, la seconde. Les comédiennes ne sont pas choisies en fonction d’une apparence physique, elle est ici parfaitement secondaire. L’important étant la mélopée, la qualité de la chanson intérieure, la pièce est un chant choral sur la mort du frère et du fils. La grande sobriété de la mise en scène permet aux spectateurs d’intégrer cette intimité. Dominique Terrier aime les comédiens, il sait les écouter et sa direction d’acteurs est en tous points remarquable. On sent la confiance de ce choeur antique en blouse grise qui offre le meilleur de son art. Il suffit d’entendre le silence de la salle. Il suffit d’écouter ce chant d’amour contre l’oubli. Les cinq comédiennes sont magnifiques et Nirupama Nityanandan prouve encore une fois à ceux qui ne l’auraient pas encore compris qu’elle peut tout jouer avec cette finesse de jeu et sa subtilité d’écoute. Lavoir Moderne Parisien 18e.


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