LES HORS LA LOI

Article publié dans la Lettre n° 270


LES HORS LA LOI de Alexandre Bonstein. Mise en scène Agnès Boury avec Ariane Pirie, Caroline Soria, Grégory Dunesme, Rachid El Ouaghli, Lila Chabha Derridj, Sherazade Tamzought, Patricia Assouline, Rosario Cusumano, Patrick Laviosa, Gilles Vajou ou Jacques Verzier ou Laurent Bàn.
À « La Maison bleue », centre pour handicapés, mademoiselle Campiche, Diane pour les intimes, est « la Calamity Janes de l’éducation spécialisée ». Elle organise le spectacle de fin d'année sur le thème de Bony and Clyde et houspille les pensionnaires afin que chacun joue son rôle à la perfection. Elle attend d’ailleurs avec impatience le comédien professionnel qui vient l’aider à mener à bien cette entreprise quelque peu périlleuse. Diane respire la joie de vivre et l’enthousiasme même si Evelyne, la comptable, joue parfois la trouble fête question dépenses. La Maison bleue est donc en pleine effervescence lorsque Carlo survient, braquant une arme au beau milieu de la répétition. Accompagné de son complice Gégé, il est plutôt nerveux, mais Diane est ravie de voir que malgré le retard conséquent, son comédien tant attendu est enfin là. Avec lui le spectacle va changer de tournure et elle ne peut que le féliciter pour cette arrivée fracassante : il est déjà dans la peau de son personnage ! Carlo atterré ne dit rien et rengaine son arme. Il vient de se faire la belle durant son transfert de prison et il est en cavale avec Gégé. Après réflexion, nos deux hors la loi décident de passer la nuit au centre, puis finissent par rester. Cette planque en vaut une autre. Carlo tente alors de se fondre dans le personnage de Clyde tandis que Gégé s’adapte à merveille, découvrant des talents artistiques et linguistiques surprenants, dissimulés jusqu’ici aux yeux de Carlo, éberlué. Les répétitions se succèdent entre rires, énervement et disputes mais la police n’est pas loin. Nos deux évadés sont activement recherchés…
Avec cette comédie musicale spécialement écrite pour des comédiens handicapés, Alexandre Bonstein évite tous les écueils liés à cette particularité. Il mène avec fougue le fil conducteur : le destin de tous ces hors la loi qui ont, en leur temps, défrayé la chronique, exploitant, entre autres, les chansons écrites pour les célébrer. Loin de vouloir jouer la corde sensible de l’apitoiement, il aborde intelligemment les thèmes de la marginalité et de l’exclusion, mais aussi celui du regard des autres. Agnès Boury met en scène ce texte drôle et émouvant, sachant exploiter les qualités artistiques de tous les comédiens qui se donnent à fond. Ils sont formidablement vrais, se jouant de leur handicap pour amuser ou émouvoir. Ensemble, ils nous offrent un spectacle rare, bien ficelé, et donnent une leçon de courage et un bel exemple de réussite. «Tous les hommes sont égaux, mais il en est de plus égaux que d’autres », rappelle l’en-tête du programme, citant Georges Orwell. Sur cette scène, ils le sont plus encore et forcent l’admiration. Théâtre du Gymnase 10e (08.92.70.79.20).


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