EN TOUTE CONFIANCE

Article publié dans la Lettre n° 275


EN TOUTE CONFIANCE de Donald Margulies. Mise en scène Michel Fagadau avec Barbara Schulz, Jean-Pierre Lorit, Jean-Pierre Malo, Elodie Navarre.
Jonathan, un peintre juif américain devenu riche et célèbre, est de passage à Londres pour une rétrospective de ses oeuvres. Il profite de cette occasion pour rendre visite à Patricia, un amour de jeunesse, qui fut également sa muse à l’époque de leurs études et des vaches maigres. Celle-ci, est devenue archéologue, s’est installée en Angleterre et s’est mariée à Nick, lui-même archéologue. Depuis, elle dirige les fouilles qu’il a mises à jour. L’intrusion de Jonathan dans leur vie paisible, loin des rumeurs de la capitale, n’est pas très bien perçue par Nick. Tout d’abord bourru, voire impoli, il ne se donne guère de peine pour mettre Jonathan à l’aise. Patricia arrive, l’accueille elle aussi sans beaucoup d’enthousiasme. Cet amour d’autrefois qu’elle ne pensait jamais revoir, ravive des souvenirs qu’elle s’applique à oublier pour s’efforcer de vivre. Elle a suivi de loin la carrière de Jonathan. Il n’a en fait jamais quitté son esprit ni son coeur. C’est alors que Jonathan s’aperçoit qu’elle a gardé le portrait qu’il avait fait d’elle, l’une de ses toutes premières toiles et seule rescapée car il a détruit ses œuvres de jeunesse. Cette redécouverte va le frapper en tant que peintre mais aussi l’émouvoir en tant qu’homme. Fragilisé par le décès très récent de son père, il se trouve projeté face au regard de Patricia qui n’a pas surmonté leur rupture et à celui de Nick qui en subit depuis dix ans les conséquences. Au cours de cette visite Jonathan, qui entre temps a consenti une interview difficile à Londres sur sa peinture avec une journaliste allemande, va de nouveau devoir défendre son art mais aussi être confronté au mal être de ses hôtes.
La pièce de Donald Margulies aborde en profondeur de multiples thèmes. Celui de l’art, de la notoriété et de la richesse qu’il apporte parfois, provoquant les jalousies, celui de l’identité et du poids de la religion chez une communauté marquée à jamais par la Shoah et celui enfin des conséquences d’une passion non partagée, inaboutie, donc insurmontable.
Michel Fagadau joue avec les époques, mêlant présent et passé en de savants allers et retours, jouant, grâce à une mise en scène fluide, avec les actes et les sentiments de chacun afin de nous amener progressivement aux sources de la séparation. Les comédiens s’emparent de ce texte bien écrit, conduisant avec subtilité leur personnage dans une douloureuse introspection. Si Elodie Navarre est excellente en journaliste insidieuse, Jean-Pierre Malo, et Jean-Pierre Lorit sont d’un naturel remarquable dans les rôles respectifs de Nick et Jonathan. Barbara Schulz montre quant à elle les multiples facettes de son talent. Lumineuse et très présente sur scène, l’émotion qu’elle exprime à la fin est vraiment communicative. Comédie des Champs-Elysées 8e.


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