EN CE TEMPS-LÀ, L'AMOUR …
Article
publié exclusivement sur Interrnet avec la Lettre
n° 373
du
27 octobre 2014
EN CE TEMPS-LÀ, L'AMOUR … de Gilles
Ségal. Mise en scène et interprétation Pierre-Yves Desmonceaux.
Comme un temps de Genèse… sept jours et sept nuits pour narguer
la mort. Sept journées pour conjurer la langueur pestilentielle,
l'angoisse qui ronge, le vide divin, sept insupportables étirements
du temps pour s'emplir de tout ce qui devrait faire un homme. Le
père s'y emploiera dans l'apparente folie de l'inutile, le fils
y accueillera avec confiance l'ultime paix. Et le train ronronne
dangereusement.
Au soir d'un silence pudiquement conservé, le narrateur si longuement
survivant raconte enfin à son fils cette lente dérive, entre cimetière
et latrines, entre rires de fièvre et complicité des gestes et des
regards, de prières insensées des bigots en recul horrifié des gens
« normaux ». Mozart et Spinoza sont convoqués au colloque
paternel de l'intelligence, et ce désopilant anarchiste d'oncle
Joseph qui refusait la vérité des adultes, et le peloton qui hésitait
à assassiner le pitre.
C'est l'eau offerte, c'est la honte bue, ce sont les regards qui
scellent une lucidité irrémédiable dans la saine dérision de ces
noces d'épouvantails.
Une leçon décapante sur la liberté, cette chaîne que brise enfin
le rire du clown. Pan sur la mort vaincue ! Pierre-Yves Desmonceaux
porte la valise de l'éternel passager de la vie et de la mort si
proche, et prête ses voix entrelacées au récit de l'enfer. Léger
et poignant comme le Chant des Chants, intemporel comme Don Juan,
La ci darem la mano, vieni vieni, andiam andiam, mio bene.
Admirable.
En ce temps-ci, l'amour… du théâtre, lorsqu'il offre de tels
instants. A.D. Théâtre du Lucernaire 6e.
Retour
à l'index des pièces de théâtre
Nota:
pour revenir à « Spectacles Sélection »
utiliser la flèche « retour » de votre navigateur
|