EDOUARD
DANS LE TOURBILLON
Article
publié dans la Lettre n° 230
EDOUARD DANS LE TOURBILLON de Sylvie
Blotnikas. Mise en scène Julien Rochefort avec Sylvie Blotnikas,
Julien Rochefort.
Edouard a pris sa journée de mercredi. Dans deux jours, il est convié
à un grand dîner au ministère, important pour sa carrière, et il
doit bien sûr être accompagné. Divorcé, un enfant, sa nouvelle compagne,
Eléonore, vient de le quitter. Il se rend compte à quel point il
est difficile de se trouver une cavalière, prête à l’accompagner
et présentant bien. Au cours des rendez-vous ou des rencontres fortuites,
Edouard présente sa requête. Clotilde, sa copine de toujours, lui
aurait volontiers rendu ce service mais elle lui demande en échange
un numéro de téléphone qu’Edouard hésite à lui donner. Sophie, son
ex et mère de leur enfant, craint la réaction du nouvel homme de
sa vie. Zoé, sa cousine, rechigne à lui confier pourquoi elle n’est
pas libre ce jour là... Les huit jeunes femmes auxquelles il va
confier ou non son problème vont, le temps de cette journée, et
tout au long de leurs conversations, lui renvoyer l’image de sa
propre vie. Tout à son souci, il ne va pas s’apercevoir qu’après
tant d’années, elles ont autant de difficultés que lui à se construire
une existence qui les satisfasse et les épanouisse.
Il y a quatre ans, Sylvie Blotnikas, déjà en compagnie de Julien
Rochefort, nous avait régalés d’une fort jolie pièce, Antoine
et Catherine (Lettre 171), une histoire d’amour qu’elle
échelonnait sur une cinquantaine d’années, faisant revivre leur
jeunesse et celle de leurs parents à plusieurs générations de spectateurs.
Elle s’intéresse aujourd’hui aux trentenaires et sonde le coeur
de ces hommes et femmes d’aujourd’hui qui, mariés, célibataires
ou divorcés, ont tous pour point commun le même désenchantement
face à la vie, fait de crainte, d’incertitude et de solitude.
La mise en scène de Julien Rochefort, et le décor qui se résume
à quelques sièges, aussi simples et minimalistes que ceux de la
pièce antérieure, donnent une place privilégiée au texte parsemé
de réflexions justes et bien observées sur les incertitudes de l’amour.
Tout en scrutant les émotions d’aujourd’hui, Sylvie Blotnikas laisse
aussi une place à la nostalgie du passé. Elle campe à elle seule
toutes ces jeunes femmes avec beaucoup de finesse, sachant chaque
fois modifier son jeu selon la personnalité du personnage tandis
que Julien Rochefort joue cet Edouard désorienté, à l’embarras si
touchant. Quatre ans après, nous les retrouvons inchangés, comme
si un lien imaginaire reliait les deux pièces comme il les lie l'un
à l'autre. Une fois de plus, ils nous séduisent et nous émeuvent.
Poche Montparnasse 6e.
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