LES
DEUX CANARDS
Article
publié dans la Lettre n° 288
LES DEUX CANARDS de Tristan Bernard
et Alfred Athis. Adaptation et mise en scène Alain Sachs avec Isabelle
Nanty, Yvan Le Bolloc’h, Urbain Cancelier, Pierre-Olivier Mornas,
Gérard Chaillou, Jean-Marie Lecoq, Catherine Chevallier, Jean-Pierre
Lazzerini, Jean-Louis Barcelona, Michel Lagueyrie, Laurent Méda,
Cassandre Vittu de Kerraoul.
Vous l’aurez vite compris. Il ne s’agit pas de deux volatiles mais
de deux feuilles de chou, La Torche et Le Phare, l’une
paraissant le matin et l’autre le soir, mais dont le rédacteur en
chef est la même personne. Comment Lucien Gélidon s’est-il fourré
dans un pareil guêpier? La cause est l’attrait coupable de deux
jupons qui le rendent fou, l’un nommé Madeleine croisé à Paris au
cours d’un tango mémorable, l’autre nommé Léontine rencontré en
province alors qu’il suivait le premier ! Que l’un des journaux
soit de gauche et l’autre de droite, qu’il étripe dans celui du
matin ceux qu’il encense dans celui du soir ne le dérangent pas
outre mesure: En politique tout est possible! Quoiqu’il en soit,
Gélidon pour les uns, Montillac pour les autres, a bien du mal à
gérer la situation, d’autant que la rédaction de La Torche
et du Phare se trouve au même endroit et que l’imprimeur
ne fait qu’un sans le savoir! Flash le secrétaire de la rédaction,
renégat qui a lâché La Torche pour travailler au Phare,
ne comprend pas pourquoi il ne rencontre jamais Montillac, son nouveau
rédacteur, et Larnois, arrivé depuis peu, tente de suivre les agissements
de son ami de trente ans, offrant une oreille attentive ici et là.
Entre le Q.G. de la rédaction et le Château du Baron Saint-Amour,
père de Madeleine, les allées et venues sont épiques jusqu’au moment
critique ou Gélidon va se provoquer lui même en duel !…
Une débauche de décors tous plus « léchés » les uns que les autres
de Stéphanie Jarre et de très jolis vêtements d’époque taillés sur
mesure par Emmanuel Peduzzi, sont l’écrin et les apprêts non négligeables
de cette comédie réjouissante troussée par Tristan Bernard et Alfred
Athis, pièce qui n’a pas été rejouée depuis sa création en 1913
et qu’ Alain Sachs a redécouverte avec jubilation. Le metteur en
scène, particulièrement en forme, crée d’une main de maître une
mise en scène virevoltante qui ne laisse guère respirer les interprètes.
Il faut dire que la situation pour le moins originale de Gélidon
est propice à de nombreux rebondissements et que tous les ingrédients
du bon vaudeville, qu’un Feydeau n’aurait pas désavoué, sont là,
ciselés par l’humour si particulier de Tristan Bernard doublé de
celui d’Alfred Athis. Douze comédiens truculents exploitent à merveille
des dialogues hilarants et les situations délirantes. Isabelle Nanty
et Yvan Le Bolloc’h en tête ne se laissent même pas impressionner
par une coupure de courant, reprenant le cours de leur conversation
comme si de rien n’était, après un aparté avec le public en joie!
Du grand art ! Théâtre Antoine 10e.
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