LES DAMES DU JEUDI

Article publié dans la Lettre n° 315


LES DAMES DU JEUDI de Loleh Bellon. Mise en scène Christophe Lidon avec Marina Vlady, Catherine Rich, Annick Blancheteau, Bernard Alane, Grégory Gerreboo.
Dès la première minute chez Loleh Bellon, une atmosphère particulière s’installe, qui emprisonne sans appel tout spectateur, même le plus exigeant. Les Dames du jeudi ne fait pas exception. Le premier dialogue entre Sonia et son fils Victor confère immédiatement une intimité communicative, lorsque s’expriment la folle tendresse, la complicité que rien et surtout pas l’argent ne viendra ternir. Et pourtant, il y aurait beaucoup à dire sur ce fils célibataire, tout juste quadragénaire, qui vit aux crochets d’une mère qui l’a élevé seule et tire depuis des années le diable par la queue. C’est ce que pensent Marie et Hélène qui viennent prendre le thé et papoter tous les jeudis chez Sonia. Elles se connaissent depuis leur plus tendre enfance. Sonia est une fille d’émigrés russes, Marie a épousé Jean, le frère chéri d’Hélène. Là aussi la complicité amicale et affectueuse entre les trois femmes est palpable. Cimentée par un passé commun et les aléas de la vie, elle a gommé aujourd’hui les chamailleries et des jalousies d’autrefois dont elles se gaussent maintenant, parvenues à un âge où la sagesse bannit l’égoïsme et ouvre la voie à la générosité.
Christophe Lidon est incomparable dans ce genre de mise en scène, jouant avec vivacité sur les différentes époques, alternant avec virtuosité présent et passé, sachant doser humour et émotion lors de ces rendez-vous hebdomadaires. La pertinence de la distribution est, soulignons-le, un atout précieux. Le décor, un salon atypique rempli d’objets hétéroclites et de tissus bigarrées ressemble à sa propriétaire Sonia. Marina Vladi lui prête sa personnalité slave fantasque, elle irradie véritablement sur scène. Catherine Rich est remarquable en célibataire endurcie. Les dialogues récurrents sur la concession familiale du cimetière, entre autres, feront date. Elle les mène savamment, allant de conserve avec Annick Blancheteau, irrésistible dans le rôle de Marie, drôle et émouvante, gardant toujours ce côté franc et « carré » qu’on lui connaît. Grégory Gerreboo est un Victor touchant, passant finement de l’adulte à l’enfant. La présence de Jean, enfin, frère et mari adoré disparu, joué comme une caresse par Bernard Alane, donne l’ultime touche émouvante à la représentation. Que pouvait-on espérer de mieux de cette rencontre entre Loleh Bellon et Christophe Lidon, que lient les mots intelligence, tendresse, complicité, humour, soutenus par trois comédiennes d’exception? Voici une fois encore une création remarquée du Cado d’Orléans. Théâtre de l’Œuvre 9e.


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