LA DAME DE LA MER

Article publié dans la Lettre n° 358
du 7 octobre 2013


LA DAME DE LA MER d’Henrik Ibsen. Adaptation Éric-Emmanuel Schmitt. Mise en scène Jean-Romain Vesperini avec Jacques Weber, Anne Brochet, Jean-Claude Durand, Ninon Brétécher, Chloë Chaudoye, Laurent Fernandez, Jean-François Lapalus, Antoine Quintard.
Mariée depuis trois ans au Docteur Wangel, plus âgé qu’elle et très épris, Ellida ne semble pas avoir trouvé sa place dans un foyer où l’ombre de la première épouse et mère de deux jeunes filles hante encore la demeure. Son lieu d’existence, à l’intérieur d’un fjord, l’étouffe. Les habitants ne comprennent guère cette dame qui vient de la mer, d’où le surnom qu’ils lui ont donné. Elle garde profondément ancré en elle un lourd secret qui a justement trait à la mer et à la nostalgie qui s’y rapporte et qui va peu à peu se dévoiler avec l’apparition d’un étranger. Dans l’existence apparemment insouciante de cette famille et de ses amis, avec les promenades, les fêtes et les conversations à bâtons rompus de jeunes gens aux aspirations encore enfantines, se glisse le drame sourd d’un être qui souffre. Le docteur Wangel, impuissant face à la mélancolie de sa femme, invite son ami Arnholm pour l’aider à la guérir. Mais l’ancien prétendant de la jeune femme n’y parvient pas. Wangel somme alors Ellida de faire un choix : poursuivre sa vie avec lui ou sans lui.
Écrite en 1888, La Dame de la mer appartient à la troisième partie de l’œuvre d’Henrik Ibsen, dite symboliste. La pièce dont l’atmosphère oscille entre réalisme et fantastique, traite des pulsions d’une femme obsédée par l’amour perdu de la mer et oppressée par une existence qu’elle n’a pas choisie librement. L’auteur plonge au cœur de l’intimité de ses personnages. L’analyse psychologique de cette introspection, qui fera considérer la pièce comme la plus symbolique de toutes, intéressera d’ailleurs les psychanalystes, apparus à la même époque. Contre toute attente, le choix d’Ellida est celui d’un bonheur raisonné et enfin choisi que l’adaptation d’Éric-Emmanuel Schmitt et la mise en scène de Jean-Romain Vesperini soulignent avec finesse et subtilité. Le vaste décor dépouillé, d’inspiration nordique, aux couleurs froides, si on excepte le rare mobilier, permet une grande mobilité aux comédiens qui contraste avec l’étouffement intérieur d’Ellida. On saluera le jeu puissant de Jacques Weber, celui léger et joyeux des autres comédiens et, par-dessus tout, l’interprétation lumineuse d’Anne Brochet. Théâtre Montparnasse 14e.


Retour à l'index des pièces de théâtre

Fermez cette fenêtre ou mettez-la en réduction pour revenir à « Spectacles Sélection »