COUPABLE
OU NON COUPABLE
Article
publié dans la Lettre n° 184
COUPABLE OU NON COUPABLE d’après l’oeuvre
de Ayn Rand, réalisé et présenté par Robert Hossein avec quinze
comédiens dont Natacha Amal, Michel Creton, Laurence Badie, Michel
Ruhl, Dominique Rozan, Benoit Allemane, Jean de Conninck.
Un soir d’hiver, un homme tombe du haut d’un building et vient s’écraser
sur le sol, désarticulé et méconnaissable. Si l’enquête conclut
tout d’abord à un suicide, la personnalité du mort attire pour le
moins l’attention des enquêteurs. Karl Faulkner, d’origine suédoise,
est installé à New-York depuis une dizaine d’années avec Karen Borg,
sa secrétaire qui est aussi sa maîtresse. Homme d’affaires, il a
batti une fortune considérable en escroquant des petits épargnants.
Au bord de la faillite, il a épousé la fille d’un richissime homme
d’affaires new-yorkais qui a épongé une partie de ses dettes. Si
les affaires de Karl restaient dans un état préoccupant, le ménage
semblait solide et Karl n’avait aucune raison de mettre fin à ses
jours, d’après le témoignage de sa femme et de son beau-père. En
revanche, d’après la police qui l’a arrêtée, Karen Borg avait des
raisons d’en vouloir à son ancien patron et amant, évincée de son
lit et de ses affaires depuis le mariage de celui-ci. C’est à son
procès que vont assister les spectateurs, non en tant que spectateurs
passifs, mais en tant que véritables jurés. Après avoir entendu
la déposition des témoins puis les plaidoiries, ils devront en leur
âme et conscience juger si Karen Borg est coupable du crime qui
lui est reproché, non coupable, ou coupable avec des circonstances
atténuantes.
Robert Hossein, toujours aussi dynamique, est passé maître dans
l’art des spectacles interactifs. Celui-ci, basé sur une intrigue
policière, a l’intérêt de mieux faire découvrir la justice et ses
rouages. Son intérêt va au-delà d’un simple divertissement. Nullement
manichéen, il fait appel à la perspicacité et au jugement du spectateur-juré
qui décidera de la culpabilité ou de l’innocence de l’accusée selon
son éducation, ses opinions mais surtout selon son intime conviction.
Mieux qu’un sondage, le spectacle donne une idée précise de la conscience
française et de sa position face à la peine de mort. Grâce à une
mise en scène menée tambour-battant, à des comédiens très impliqués
dans leur rôle et à un Robert Hossein-maître de jeu qui passionne
et amuse jusqu’au bout, la soirée est excellente et l’on garde l’impression
d’avoir participé non à un jeu mais à une démonstration didactique
qui donne une autre vision de la justice. Théâtre Marigny 8e
(Lettre 184).
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