BEYROUTH HOTEL

Article publié dans la Lettre n° 290


BEYROUTH HOTEL de Rémi De Vos. Mise en scène Niels Arestrup avec Niels Arestrup, Isabelle Le Nouvel.
Voilà un spectacle qui suscite des réactions contradictoires. Il y a les enthousiastes qui aiment tout et ceux qui détestent globalement le spectacle. Dans une société où l’on veut tout normaliser, avoir de telles réactions est plutôt rassurant.
Beyrouth Hôtel est un titre qui fait peur. Encore une pièce sur la guerre, pense-t-on. Pas du tout. Le titre est parfaitement justifié lorsqu’on a vu la pièce. Un auteur de théâtre est invité au Liban par un metteur en scène qui veut monter l’une de ses pièces. Las d’attendre à l’aéroport le metteur en scène qui devait l’accueillir, l’auteur prend un taxi pour Beyrouth. Il a demandé au taxi de le déposer dans un hôtel correct, pas trop cher. Le portable de son hôte invisible reste muet. Il s’installe dans cet hôtel. Il ne se promène pas. Il divague entre sa chambre et le hall sous l’œil de la jolie réceptionniste qui est prête à lui rendre divers services. Accroché à son portable il tente, entre autres, de renouer le lien avec sa femme qui vient de le quitter. La réceptionniste est la seule à lui parler, à lui répondre. Notre auteur échoué dans cette ville inconnue, emblématique de la guerre et de la résistance, fait un point douloureux sur sa vie et son œuvre. Le fauteuil du hall devient un divan où il s’auto analyse. Ses préoccupations semblent bien loin de Beyrouth et de la réceptionniste qui est le seul lien qu’il a avec le monde présent.
Niels Arestrup a eu un coup de foudre pour le texte de Rémi De Vos. Cet auteur a le vent en poupe après la reprise cet été de Projection privée et la création à Bussang du très réjouissant Le ravissement d’Adèle. Beyrouth Hôtel présente un ton plus introspectif. Le chaos personnel et intime de l’auteur écouté par une jeune libanaise née dans un pays chaotique permet des ponts, des liens entre l’esprit et le matériel. Niels Arestrup a réalisé une mise en scène simple où les lumières cernent les comédiens et étouffent l’atmosphère. Est-il besoin de rappeler l’immense comédien qu’il est. Il est cet auteur pris en otage de ses propres contradictions aux prises avec les affres de la création artistique. Niels Arestrup prête à cet auteur son autorité de géant aux pieds d’argile. Il est fascinant de présence et de fragilité. Studio des Champs Elysées 8e.


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