BASH.
Scène d'apocalypse
Article
publié dans la Lettre n° 212
BASH
(La Fête). Scène d’apocalypse de Neil Labute. Adaptation
et mise en scène Pierre Laville avec Anne Brochet, Lionel Abelanski,
Stéphanie Fagadau, Patrice Costa.
Bash est le récit de trois crimes odieux, indépendants les
uns des autres, l’un, commis au nom des bonnes moeurs, l’autre par
raison d’état, c’est à dire pour conserver ce qui a été acquis,
le troisième, fruit d’une vengeance lentement mûrie. Trois tragédies
qui ont la résonance des tragédies grecques résumées en deux phrases
par l’un des acteurs: on l’a fait puis l’on continue de vivre
comme avant avec ce poids terrible. Personne ne peut se rendre compte
de sa souffrance à moins d’être passé par la même épreuve. Les
trois meurtriers vont devoir continuer de vivre avec sur la conscience
un crime impuni. Chacun d’eux prend le public à témoin pour tenter
d’expliquer son geste, d’expliquer ce qui l’a poussé à commettre
un acte d’une telle violence.
Bash est le fruit du travail d’un auteur américain de trente
ans. Ce qui frappe, c’est bien sûr l’horreur de son sujet mais aussi
la limpidité de son déroulement et la clarté de sa démonstration.
Les acteurs s’adressent au spectateur d’une manière très simple,
directe, comme s’il racontaient une anecdote, sans complexe de culpabilité,
sans morale, sans remords, dépassés par l’ampleur de ce qu’ils ont
commis. Il ne s’agit pas là d’un monologue, encore moins d’une analyse
où la psychologie entrerait en jeu, mais de trois récits cliniques
et méticuleux d’un fait. Chacun de nous est simplement interpellé,
pris à témoin pour écouter, plongé dans la barbarie, sans garde-fou.
Bien que cette pièce soit le reflet de la société américaine dans
laquelle vit l’auteur, elle va bien au-delà, un crime collectif
homophobe, deux infanticides dépassent en effet n’importe quelle
frontière.
Si Patrice Costa et Stéphanie Fagadau se renvoient la balle avec
art et conviction, Lionel Abelanski est tout à fait remarquable
dans le rôle du commercial prêt à tout pour conserver son poste.
Anne Brochet transmet à son personnage la luminosité et la force
qui la caractérisent, main de fer dans un gant de velours. On sort
saisis, épouvantés mais impressionnés. Studio des Champs-Elysées
8e (01.53.23.99.19) jusqu'au 12 avril 2003.
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