L’AMOUR EST ENFANT DE SALAUD

Article publié dans la Lettre n° 218


L’AMOUR EST ENFANT DE SALAUD de Alan Ayckbourn. Adaptation Michel Blanc. Mise en scène José Paul avec Isabelle Gélinas, Bruno Madinier, Lysiane Meis, Chick Ortega.
Miss Barbara est une trentenaire rigide qui ne s’en laisse pas compter. Précise et dure dans le travail, elle est toute dévouée à son patron, de toute son âme. Quant au corps, il n’en est pas question. Elle accueille chez elle Nikki, sa meilleure amie, accompagnée d’Amish, son nouveau boy friend. Elle nourrit les craintes les plus vives à l’endroit de cet homme. Barbara le déteste au premier coup d’oeil. Macho, vulgaire, bref, elle ne l’aime pas. Nikki a le don d’attirer des hommes peu recommandables qui l’exploitent. Amish n’est pas de cette race. Il trouve Barbara désagréable et sans attraits. Nikki est ravie d’être accueillie dans la maison de son amie. Barbara a transformé sa maison en appartements. Elle vit au rez-de-chaussée. Au- dessus, la chambre des tourtereaux, dont les ébats mettent ses nerfs à l’épreuve, le sous-sol étant le royaume du sympathique et encombrant Gilbert. Entre Amish, l’étalon écossais et Barbara, le parangon de vertu anglaise, le courant ne passe pas. Tout est sujet de conflit, ils se toisent, se jaugent, jusqu’au moment où...Ah! Amour, Amour quand tu nous tiens!
Alan Ayckbourn est un auteur anglais qui porte chance aux scènes françaises. Lui, si typiquement british, épingle avec humour l’âme humaine. L’adaptation signée par Michel Blanc est une réussite, elle restitue toute la drôlerie du texte, et surtout Michel Blanc n’a pas tenté de franciser la pièce, il aurait été dommage de nous passer du look écossais (terrifiant) de Nikki et des rouflaquettes de Bruno Madinier, alias Amish.
José Paul est un enfant de la comédie, il possède un sens inné de rire et du rythme. Sa mise en scène inventive, alerte, souligne la comédie de moeurs. Ici, le dispositif scénique désiré par l’auteur ne vampirise pas l’anecdote, il la renforce. La passion irrépressible qui jette notre vieille fille coincée dans les bras de notre écossais goguenard, déclenche une onde de choc de fous rires dans la salle. Lysiane Meiss est une Nikki naïve adorable, Chick Ortega devrait porter des vêtements à sa taille, il est un Gilbert impayable. Bruno Madinier trouve dans le rôle d’Amish enfin l’assurance qu’il n’est pas que le comédien d’un rôle et que la composition est un morceau de choix pour lui. Isabelle Gélinas est une tornade, fine mouche, psychorigide ou amoureuse débridée, elle est une bénédiction. Sa transformation, de la trentenaire coincée en bête de sexe, est hilarante. Cette fille de la perfide Albion est une Carmen qui boit du thé et nous entraîne dans l’un des meilleurs spectacles de la saison. Théâtre Tristan Bernard 8e (01.45.22.08.40) (Lettre 218).


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