MÂROUF, SAVETIER DU CAIRE
Article
publié dans la Lettre n° 355
du
27 mai 2013
MÂROUF, SAVETIER DU CAIRE de Henri
Rabaud. Livret Lucien Népoty. Direction musicale Alain Altinoglu.
Mise en scène Jérôme Deschamps avec 13 solistes, les danseurs de
la Compagnie Peeping Tom, le chœur Accentus et l’Orchestre Philharmonique
de Radio France.
Pour terminer la saison, l’Opéra Comique nous présente, après plus
de soixante ans d’absence, ce grand succès français de la première
moitié du XXe siècle joué dans le monde entier dont près de 250
fois à Paris, tant Salle Favart où il est créé en 1914, qu’à l’Opéra
Garnier. En effet il s’agit bien d’un opéra, sans intermède parlé,
et les sur-titres ne sont pas inutiles ! L’argument, très simple
ou plutôt simplifié, est tiré d’un conte des Mille et Une Nuits,
L’Histoire du Gâteau échevelé au miel d’abeilles.
La « calamiteuse » femme de Marouf, un savetier du Caire, exige
qu’il lui rapporte un kénafa sucré au miel d’abeilles alors qu’il
n’a pas le premier dinar pour l’acheter. Son ami et voisin, un pâtissier,
lui offre un kénafa au miel de canne à sucre. Sa femme le refuse
et prétendant qu’il l’a battu, fait rosser son mari par les sbires
du Kâdi, malgré les témoignages des voisins. Marouf décide alors
de se joindre à des marins en partance pour Mariette et de là dans
le golfe persique. Le bateau fait naufrage et Marouf, seul survivant,
échoue sur une plage où il est recueilli par Ali, un riche marchand,
en qui il reconnaît un ami d’enfance, le fils du pâtissier. Ali
le présente alors comme un très riche marchand qui attend une immense
caravane chargé de biens précieux. Entendant cela le sultan, malgré
la méfiance de son vizir, invite Marouf au palais et le marie à
sa fille Saamcheddine, vidant ainsi le trésor. La caravane se fait
attendre ! Marouf et sa nouvelle femme sont très heureux ensemble.
Il lui avoue la supercherie. Tous deux décident alors de s’enfuir.
En chemin ils rencontrent un vieux fellah labourant péniblement
son champ. Marouf décide de l’aider. La suite tient bien sûr du
merveilleux habituel des contes.
Pour jouer un tel opéra il faut de la démesure. Jérôme Deschamps
ne l’exprime pas dans les décors, des sortes de blocs rectangulaires
percés d’ouvertures, très loin des fabuleux décors très réalistes
de la création, dont on a des photos. En revanche les costumes sont
extravagants et très drôles que ce soit le pâtissier avec un énorme
bonnet en forme de gâteau, le muezzin avec un porte-voix sur son
bonnet ou la princesse qui arrive, le visage voilé, dans une robe
ressemblant à une gigantesque montgolfière ! Les dix danseurs de
Peeping Tom, s’ils ne sont pas convaincants dans l’acte III, dansent
en revanche un ballet très réussi dans le jardin du IVe acte. Ils
jouent également des ânes pleins d’humour et d’inventivité qui font
éclater de rire le public. Les dialogues sont truffés de réparties
amusantes. Marouf, dans le jardin : « Je suis le jet d’eau qui ronronne
d’amour ». La princesse, à Marouf : « O palmier dont je suis la
palme pendante ». Le sultan à son vizir : « Je ferai entrer ta longueur
dans ta largeur ». Et aussi le fellah louant Allah à propos d’une
certaine Aliyah : « Ton sein gauche est si beau, délicat et farci
que je m’étonne, Aliyah, qu’Allah ait réussi à faire l’autre tout
semblable » !
La mise en scène est excellente. Dès le début, avec l’arrivée sur
la scène d’un sac d’où émerge ensuite le savetier, qui plongera
littéralement dedans quand le danger arrivera, le ton est donné.
Même lorsqu’il n’y a pas de chant, la scène est occupée par des
personnages dansant ou faisant des mimiques. Il n’y a pas de temps
morts. L’orchestre, sous la baguette d’Alain Altinoglu, fait des
merveilles et les deux heures trente s’écoulent sans que l’on voie
le temps passer. Parmi les chanteurs, tous très bons, nous avons
particulièrement apprécié la prestation du baryton Jean-Sébastien
Bou dans le rôle très physique de Marouf et celle de la soprano
Nathalie Manfrino, révélation de l’année aux Victoires de la Musique
Classique 2006, dans le rôle de la princesse Saamcheddine. Opéra
Comique 2e. R.P. Pour
voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien
: www.opera-comique.com.
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