FRAMBOISE FRIVOLE. DELICATISSIMO
Article
publié dans la Lettre n° 366
du
24 mars 2014
FRAMBOISE FRIVOLE. DELICATISSIMO.
Nouveau spectacle de et avec Peter Hens et Bart Van Caenegem.
En tenue de soirée, le ténor et violoncelliste Peter Hens et le
pianiste Bart Van Caenegem se présentent sur scène et saluent dignement
le public, venu écouter, en principe, un concert des plus classiques.
En ouverture, le Concerto pour une voix de Saint-Preux. La
musique est connue, le public se laisse bercer au gré du son mélodieux
des deux instruments jusqu’à ce que Peter Hens, le plus loquace,
explique entre deux mesures qu’il s’agit d’un concerto pour une
fois, qu’ils ne l’ont pas joué hier et qu’ils ne le joueront pas
non plus demain ! Le public n’a pas le temps de s’étonner car, insensiblement,
le concerto si familier lui échappe, et il se surprend à fredonner
l’air d’une célèbre chanson de Joe Dassin avant de percevoir quelques
mesures qui ressemblent fort à celles d’une partition non moins
célèbre de Vangelis… Après cette mise en bouche qui surprend le
béotien mais pas les inconditionnels de ce duo, les deux musiciens
en viennent aux choses sérieuses, si l’on peut dire, et attaquent
Le Carnaval des animaux, « grande fantaisie zoologique »
de Camille Saint-Saens. La partition de cette version vocale aurait
été retrouvée dans les jarres de la mer morte par Maurice dont tout
le monde connaît les deux fils, Emile A. Jarre et Maurice
B. Jarre ! Oui, bien sûr, il y a Jean-Michel mais bon… Peter
Hens doit ici se faire pédagogue car nos deux aventuriers partent
à la recherche de l’archet perdu. Le public apprend énormément sur
l’arche de Noé dont le capitaine a eu la malheureuse idée de mettre
les piverts en deuxième classe, au niveau de la cale et, comme chacun
sait, cet oiseau ne peut s’empêcher de faire des p’tits trous, des
p’tits trous, toujours des p’tits trous… Un autre rouleau prélevé
dans la jarre nous fait découvrir un morceau, l’Evangile selon
Joseph, musique Charpentier. Joseph attend, semble-t-il avec
impatience, de se trouver dans le Nouveau Testament, son fils Jésus
étant né, comme chacun sait, six ans avant lui-même, ce qui est
normal puisqu’il s’agit du fameux bug de l’an zéro…Bref, vous n’en
saurez pas davantage.
Ainsi ils reviennent avec un spectacle inénarrable, hilarant et
renouvelé. Nouveau grâce au texte qui dénote une parfaite connaissance
du français car Peter Hens sait plus que jamais inventer avec un
formidable à-propos d’irrésistibles jeux de mots et calembours.
Nouveau car nos deux authentiques primitifs flamands sont
entrés de plain-pied dans l’ère technologique. Ils sont très fiers
de nous présenter leur superbe piano allemand fabriqué pour eux
par Yamaha qui peut se passer du concours du pianiste, et le
nouvel iPad de Bart qui remplace la partition en papier mais peut
servir à l’occasion de GPS, indispensable pour un morceau à quatre
mains, quoique…Ah ces nouvelles technologies! Quelles merveilles,
mais aussi que de tracas !
Depuis plus de vingt ans, les musiciens de ce spectacle créé par
Peter Hens, font entrer un public toujours plus nombreux dans leur
univers musical complètement décalé avec une virtuosité sans égale
et parviennent encore à surprendre et à enchanter. Leur réussite réside
aussi dans l’art de savoir capter l’attention d’un public pas nécessairement
mélomane avec des musiques suffisamment connues pour qu’il puisse
admirer la virtuosité avec laquelle ils passent d’un rythme à l’autre,
du morceau classique à la chanson moderne. Ne pensez surtout pas
que vous connaissez déjà tout leur registre et toutes leurs facéties,
laissez-vous surprendre, ils sont géniaux ! Bouffes Parisiens
2e.
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