VELÁZQUEZ
Article
publié dans la Lettre n° 383
le
25 mai 2015
VELÁZQUEZ. C’est la première rétrospective
en France consacrée à Diego Rodriguez de Silva y Velázquez (1599-1660),
le « peintre des peintres » selon Manet. Velázquez, absorbé par
les responsabilités administratives que le roi Philippe IV lui avait
confiées, a peu peint et on estime aujourd’hui à environ 120 le
nombre de tableaux conservés. Avec 119 œuvres exposées, dont 51
de Velázquez, cette exposition est donc tout à fait exceptionnelle,
même si le tableau emblématique de cet artiste, Les Ménines,
n’est pas présent. En effet Guillaume Kientz, le commissaire, explique
que l’on n’emprunte pas un monument et que c’est au Prado qu’il
faut aller voir ce chef d’œuvre !
Le parcours de l’exposition, très clair grâce à une excellente scénographie,
sobre et mettant bien en valeur chaque tableau, s’articule en quatre
grands thèmes qui suivent la chronologie. Cela commence par « Les
années de formation ». Velázquez passe six ans à se former dans
l’atelier du peintre Francisco Pacheco, à Séville, plaque tournante
de toutes les nouveautés en provenance ou à destination du Nouveau
Monde. En 1617 il est reçu dans la corporation des peintres et peut
alors exercer dans toute l’Espagne et avoir son propre atelier.
Ses premières peintures sont d’inspiration naturaliste avec des
scènes de « bodegón » (Scène de taverne, vers 1618 ; Trois
musiciens, 1616-1617) et des tableaux caravagesques (Saint
Thomas ; Saint Paul ; Saint Pierre pénitent, vers
1623) après sa découverte de ce type de peinture à Madrid, où il
vient à deux reprises pour se faire connaître du roi, ce qui est
fait en 1623.
Cette année-là le souverain, conquis par son portrait, le nomme
« Peintre du Roi ». C’est le titre de la deuxième partie de l’exposition.
Dans les années 1630, Velázquez fait un premier voyage en Italie.
Il peut alors se mesurer aux plus grands peintres de son époque
comme Poussin, Claude Lorrain ou Guerchin et pratiquer la peinture
de paysage (Vue des jardins de la villa Médicis, 1630) et
surtout la peinture d’histoire, le maître genre (La Tunique de
Joseph, vers 1630). A son retour il doit se consacrer aux portraits
du jeune espoir de la dynastie, l’infant Baltasar Carlos, que l’on
voit ainsi grandir de toile en toile (Portrait de l’infant Baltasar
Carlos sur son poney, 1634-1635). Simultanément Velázquez aborde
la fable sacrée ou profane. C’est ainsi qu’il peint l’un des chefs
d’œuvre de l’exposition, la troublante Vénus au miroir (vers
1647-1651) exposée en regard d’un marbre romain d’époque impériale,
Hermaphrodite endormi, dont il fit faire une copie en bronze
et qui aurait pu l’inspirer.
Mais ce que l’on attend du peintre du Roi ce sont des portraits.
Velázquez en peint un grand nombre comme on le voit avec la troisième
partie, « Velázquez portraitistes ». A côté des portraits officiels
et conventionnels il peint des bouffons (Portrait du bouffon
Juan Calabazas, vers 1632), des nains, des comédiens, qui lui
laissent plus de liberté pour innover et renouveler le genre. C’est
alors, dans les années 1650, que le roi le charge d’un second voyage
en Italie pour acheter des peintures et des sculptures antiques,
ou leurs copies. C’est à cette occasion qu’il exécute le magistral
Portrait du pape Innocent X (1650), « Troppo vero » (trop
vrai) aux dires du souverain pontife. A son retour en Espagne, il
trouve une cour attristée par la mort de l’infant et un roi remarié
à sa nièce Marie-Anne d’Autriche, qui mettra au monde le futur Charles
II. Les commandes de portraits affluent et Velázquez, qui a été
nommé « maréchal du palais », est à la tête d’un large atelier chargé
de dupliquer les portraits royaux pour les envoyer dans les cours
européennes. Il est secondé par son gendre Juan Bautista Martinez
del Mazo dont on voit, dans la dernière partie de l’exposition,
« Velázquez après Velázquez », un certain nombre d’œuvres (Portrait
équestre de Philippe IV, 1635) à côté de celles d’autres disciples
dont le meilleur est Carreño de Miranda (Portrait de la reine
Marie-Anne d’Autriche, vers 1671). Néanmoins, Velázquez n’a
pas vraiment fait école, sans doute à cause de la difficulté à peindre,
comme lui, avec exigence, subtilité et sobriété. Une réunion de
chefs-d’œuvre à voir absolument. Grand Palais 8e. Jusqu’au
13 juillet 2015.
Lien : www.rmn.fr.
Retour
à l'index des expositions
Page
d'accueil de « Spectacles Sélection »
|