VAN GOGH. RÊVES DE JAPON
Article
publié dans la Lettre n° 349
du 21 janvier 2013
VAN GOGH. RÊVES DE JAPON. En 1858 le Japon s’ouvre au monde et provoque une arrivée massive d’objets japonais en Europe. La vogue japonisante commence et touche aussi bien la grande bourgeoisie que les peintres et les écrivains. Parmi les grands collectionneurs d’art japonais, Monet est l’artiste qui vient en tête, tapissant d’estampes sa maison de Giverny et créant un étang couvert de nénuphars, traversé par un pont en arche, comme on en voit dans les jardins japonais.
Quand il arrive à Paris en mars 1886, Vincent Van Gogh (1853-1890) connaît déjà l’art du Pays du Soleil Levant, à travers la littérature et les grandes collections d’art japonais ouvertes au public aux Pays-Bas, et il possède déjà un certain nombre d’estampes. L’engouement des artistes qu’il fréquente à Montmartre pour le « japonisme » renforce sa passion pour l’art japonais dont il dit que c’est « quelque chose comme les primitifs, comme les Grecs, comme nos vieux hollandais, Rembrandt, Potter, Hals, Van der Meer, Ostade, Ruysdael. Cela ne finit pas ». L’accès au stock d’estampes japonaises de Siegfried Bing, dans sa galerie rue de Provence, lui permet, ainsi qu’à son frère Théo, de constituer une importante collection d’estampes d’Hokusai, Utamaro, Harunobu, Hiroshige, d’autant plus que celles-ci étaient très bon marché.
Après avoir copié servilement quelques œuvres d’Hiroshige (Pruniers en fleurs, 1887), l’artiste japonais le plus célèbre au Japon, loin devant Hokusai, pourtant mieux connu en France (La Vague), Van Gogh fait sienne la façon de peindre d’Hiroshige. Pour cela, il part pour le midi et écrit à son frère : « On aime la peinture japonaise, on en subit l’influence et on n’irait pas au Japon, c’est-à-dire ce qui est l’équivalent du Japon, le midi ? ». Cette naïveté d’imaginer que le midi ressemble au Japon lui permet de réaliser, durant les deux ans qu’il passe à Arles, puis à Saint-Rémy-de-Provence, de février 1888 à mai 1890, plus de cent cinquante peintures et dessins où se manifeste l’influence du grand maître japonais.
La présente exposition, avec une trentaine de tableaux prêtés par le musée Kröller-Müller d’Otterlo, presque tous peints dans le midi, met en évidence cette influence, de façon criante. En effet, les organisateurs ont accroché, à côté des tableaux de Van Gogh, des reproductions d’estampes d’Hiroshige, montant clairement les sources d’inspiration, tant dans les sujets (Femmes à la porte d’entrée du sanctuaire de Hachiman à Fukagawa, 1832-1835 et Le Pont basculant à Nieuw-Amsterdam, 1883) que dans le style (Plage des Maiko à Harima, 1853 et Oliveraie, 1889).
Ce rapprochement est d’autant plus intéressant que c’est l’occasion de voir à Paris, après des décennies d’absence, une exposition d’œuvres de Van Gogh. C’est aussi la première fois que l’on peut découvrir en France l’œuvre d’Hiroshige, dans une exposition parallèle dont nous rendrons compte dans la Lettre n°350. Pinacothèque de Paris 8e. Jusqu’au 17 mars 2013. Pour
voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.pinacotheque.com.
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