CHARLEY
TOOROP
Article
publié dans la Lettre n° 310
CHARLEY TOOROP (1891-1955). C’est
la première rétrospective consacrée en France à cette artiste majeure
des Pays-Bas. L’ensemble est impressionnant tant elle témoigne de
caractère et d’originalité dans ses toiles. Les thèmes abordés sont
eux aussi très révélateurs : beaucoup d’autoportraits (de
1922 à 1954), sans concessions, où elle se montre à la fois femme
et peintre, par ses vêtements et les accessoires qui l’entourent ;
des peintures d’arbres en fleurs occupant toute la surface de la
toile (Poirier, 1946) ; des natures mortes (Nature morte
avec pain, corde et bouteille, 1935) ; des peintures engagées
(Paysans, 1930 ; Clown, 1941 ; Bidons de pétrole
avec journal, 1943) et surtout des peintures de groupes où elle
montre son attachement à la famille et à ses amis.
Fille du célèbre peintre Jan Toorop, hollandais élevé en Indonésie,
et d’Annie Hall, une anglaise, Annie Caroline Pontifex adoptera
le prénom de Charlie, puis Charley. A dix-sept ans elle abandonne
ses études musicales pour se consacrer uniquement à la peinture.
Son père l’initie au métier. En 1909 elle tombe amoureuse d’un intellectuel
anarchiste, Henk Fernhout, qu’elle épousera trois ans plus tard
malgré l’opposition de ses parents. Elle en aura trois enfants,
Edgar, qui deviendra peintre, lui aussi, sous la houlette de sa
mère ; John, qui se consacrera au cinéma documentaire grâce à la
formation d’un ami de sa mère, le documentariste Joris Ivens, dont
on voit deux de ses films, et Annetje. Son mari sombrant dans l’alcoolisme
et la violence, elle le quittera en 1917 avec ses trois enfants.
Elle aura d’autres liaisons avec des poètes et des écrivains qui
auront une meilleure influence sur elle et son œuvre.
Ce qui frappe tout d’abord dans la vie de cette artiste, c’est son
admiration pour des peintres comme Van Gogh, y compris dans la période
sombre du Borinage, ou Piet Mondrian, qu’elle collectionne, ou son
père, mort en 1928, dont elle trouve qu’on ne lui donne pas toute
la place qu’il mérite. Son style commence par le luminisme (Phare
dans le soir, 1916) un mouvement qui ouvre la porte de la modernité
pour l’art hollandais, dont son père, faisant le lien entre le symbolisme
et le pointillisme est le précurseur, pour aller peu à peu vers
la « nouvelle objectivité ».
Mais le plus important, comme nous l’avons déjà souligné, est son
attachement à la famille et aux amis. Son Portrait des enfants,
1920, ou Les Sœurs, 1921, en sont les premières illustrations.
Puis ce sont surtout l’Autoportrait avec les trois enfants,
1929, et le magistral Trois générations, 1941-1950, où elle
se représente en train de faire son autoportrait devant le buste
gigantesque de son père et son fils Edgar, debout derrière elle,
une palette à la main, qui montre combien la famille était importante
pour elle.
Les amis aussi. Sa maison de Bergen, où elle s’installe à partir
de 1921, est un havre pour ceux-ci. Deux tableaux monumentaux, peints
sur le vif, d’où l’absence de Joris Ivens, illustrent cet attachement :
Le Repas des amis, 1933 et le Portrait de groupe, H.P.
Bremmer et son épouse avec des artistes de leur temps, 1938.
L’exposition rend compte de cela avec deux salles consacrées aux
œuvres de personnes de son entourage, qu’elle avait parfois formées,
comme son fils Edgar Fernhout (Autoportrait avec Rachel,
1932) ou le peintre Pyke Koch (Portrait d’Asta Nielsen, 1929)
ou qu’elle aimait, comme la photographe hongroise Eva Besnyö, amie
de son fils John, dont on voit plusieurs photos, dont un portrait
de Charley Toorop dans son atelier devant Trois générations.
En résumé, voici une exposition originale et captivante, où les
œuvres sont bien mises en valeur. A ne pas manquer. Musée d’Art
moderne de la Ville de Paris 16e. Jusqu’au 9 mai 2010. Pour
voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien
: www.mam.paris.fr.
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