SOULAGES

Article publié dans la Lettre n° 308


SOULAGES. Pour ses quatre-vingt dix ans, le Centre Pompidou consacre à l’artiste français vivant le plus connu, une importante rétrospective avec une centaine d’œuvres, surtout contemporaines, inédites en ce qui concerne les plus récentes. Pierre Soulages est né à Rodez en 1919. A partir de 1934 il peint régulièrement. Son professeur l’envoie à Paris pour qu’il passe le concours de l’Ecole Nationale des beaux-arts. Il est admis mais préfère regagner Rodez ! Après quelques mois de mobilisation en 1940 et 1941 il s’inscrit à l’Ecole des beaux-arts de Montpellier où il rencontre Colette Llaurens, qu’il épouse en 1942. Le couple vient de faire une donation à l’intention du Musée Fabre à Montpellier où, depuis 2007, plusieurs salles sont entièrement consacrées à Pierre Soulages, et une autre au futur Musée Soulages à Rodez.
L’exposition commence par les fameux « brous de noix » des années 1947-1949. Il s’agit de peintures, la plupart sur papier, faites à partir de cette couleur utilisée dans son enfance par son voisin menuisier. Ces peintures renouvellent l’abstraction. L’artiste veut montrer que ce sont les vibrations de la lumière au contact d’un sombre et d’un clair qui provoque l’émotion. Il restera indéfectiblement fidèle à ce principe. A côté de ces brous de noix, nous voyons des œuvres réalisées avec du goudron sur du verre ainsi que des encres et des gouaches. Dès cette époque, Pierre Soulages utilise d’autres manières de peindre (à l’horizontal, sur le sol) et d’autres instruments (brosses de peintre en bâtiment, racloirs, etc.). Après cette première salle, l’exposition se consacre exclusivement aux peintures sur toile bien que l’artiste ait continué à peindre sur papier, fidèle ainsi à ses tout débuts. Les années 1950-1970, où il produit les œuvres les plus connues sont présentées dans trois salles. Nous pouvons voir son évolution, ses variations avec des fonds blancs, l’apparition de la couleur bleue, des formats qui deviennent horizontaux et de plus en plus larges. Depuis 1950 il systématise les titres de ses œuvres : « Peinture, dimensions, date » ce qui, à défaut d’être évocateur, est précis.
Nous arrivons dans la salle cinq où commence la présentation des toiles qui font toute l’originalité de Soulages : des peintures monochromes, entièrement noires, qu’il appellera « outrenoir », comme on parle d’outre-mer ou d’outre Manche. Alors que dans la conception classique de la peinture le reflet est considéré comme parasitant la vision, pour lui, il est partie intégrante de l’œuvre. Sans reflet, ses toiles ne seraient que des surfaces noires semblables à des dessus de pots de peinture. Pour Soulages, outrenoir veut dire : « Au-delà du noir une lumière reflétée, transmutée par le noir. Noir qui, cessant de l’être, devient émetteur de clarté, de lumière secrète. Un autre champ mental que celui du simple noir. »
L’artiste, très tatillon dans la présentation de ses œuvres, commence par nous montrer, dans la salle 5, entièrement noire, y compris le faux plafond, sauf un mur blanc violemment éclairé, 3 peintures appartenant à une série de sept, peintes en 1990-1991. Ces peintures sont sur des potences qui visent « à donner aux tableaux leur existence de choses ».
Les cinq dernières salles sont entièrement consacrées à ces peintures noires dont nous suivons l’évolution depuis 1979 jusqu’à nos jours, où l’artiste nous donne à voir de grands polyptyques superposés, détachés des murs, voire même suspendus au milieu de la salle. Son travail est en perpétuel évolution et malgré un unique pigment, aucun tableau n’est semblable à un autre. Un film sur son travail, y compris la réalisation des vitraux de l’abbatiale Sainte-Foy de Conques, clôt cette exposition grandiose qui nous montre admirablement bien l’originalité sans précédent de ce peintre. Centre Pompidou 4e. Jusqu’au 8 mars 2010. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.centrepompidou.fr.


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