SCIENCES & CURIOSITES
à la cour de Versailles

Article publié dans la Lettre n° 322
du 7 février 2011

SCIENCES & CURIOSITES A LA COUR DE VERSAILLES. Nous savions, pour avoir participé naguère à une visite guidée spécialisée, que le château de Versailles regorge d’objets et de documents scientifiques mais cette exposition nous donne toute l’étendue de ce qui se faisait en ces lieux au temps de Louis XIV, Louis XV et Louis XVI. Cela a été rendu possible grâce aux travaux menés par le Centre de recherche du château de Versailles, groupement d’intérêt public qui réunit des Universités et de nombreuses institutions publiques.
Le parcours de l’exposition est d’une très grande clarté et la muséographie rend attractive la présentation d’objets magnifiques mais dont l’usage est parfois inconnu du grand public (tour à guillocher, graphomètre à pinnules, …). Au rez-de-chaussée nous voyons le fameux rhinocéros de Louis XV, élément phare de la Ménagerie exotique de Versailles, conservé au Muséum national d’histoire naturelle. Puis nous voyons une vidéo 360° qui nous présente les lieux ayant accueilli à Versailles toutes les formes de l’activité scientifique, de l’expérimentation à la pratique, de la démonstration à l’enseignement.
Tout le monde sait que Louis XVI était passionné par les serrures, mais il s’intéressait aussi à d’autres domaines et son prédécesseur encore plus, alors que Louis XIV se vit protecteur des sciences, sans les pratiquer. Ce dernier, sous l’impulsion de Colbert qui voulait mettre les sciences au service de l’Etat, fonda l’Académie des sciences en 1666. Un tableau imaginaire le montre au milieu de tous ces savants dans un décor évoquant les sciences de l’époque. L’une d’entre elles, l’astronomie, fut particulièrement utile pour la réalisation des fontaines de Versailles qui nécessitaient 9.500 m3 d’eau pour deux heures et demie de spectacle. Riquet, le constructeur du Canal du Midi, voulait dévier la Loire. Picard, qui avait inventé des lunettes astronomiques très puissantes, montra que c’était impossible, la Loire étant plus basse ! Finalement grâce à l’immense machine de Marly, on utilisa l’eau de la Seine. Dans la même salle on peut voir une reconstitution de la chaise volante, ancêtre des ascenseurs, créée pour Mme de Châteauroux.
Dans les autres salles sont évoqués les expérimentations, l’enseignement des sciences et des techniques, les pratiques princières et les démonstrations dans les domaines scientifiques. Pour l’expérimentation, qui privilégie la zoologie, la botanique et l’agronomie, Versailles offre des plans d’eau, des jardins, des terres agricoles, des collections d’animaux et de végétaux et des moyens financiers. Des serres à double vitrage sont créées permettant de faire pousser des ananas. Du riz est cultivé avec succès. Des croisements de mérinos avec des races autochtones permettent d’améliorer la finesse de la laine. Des médecins de renom sont également présents. Citons le chirurgien-oculiste Daviel, spécialiste de la cataracte ; Félix, qui opéra la fistule de Louis XIV après avoir testé sa méthode sur des prisonniers ; Lassone, qui inocula les princes contre la variole au lendemain de la mort de Louis XV.
Au milieu de ces recherches pour l’amélioration et le développement des médecines, des plantes, des animaux, de l’agronomie, Quesnay conçoit le Tableau œconomique, qui vise à faire apparaître les flux de richesses réelles, le produit net, et permet de calculer les conséquences de mesures politiques comme la libéralisation des échanges extérieurs ou la réforme de l’impôt, et cela, en 1758 !
Le visiteur sera sans doute plus intéressé par les magnifiques objets rassemblés ici. Les plus beaux sont la Pendule de Passemant, toujours en fonctionnement, présentée au roi en 1750, qui relie l’infiniment grand (le mouvement des planètes) à l’infiniment petit (la seconde engendrée par le balancement du pendule) et la Joueuse de Tympanon, androïde synthèse des recherches sur les mouvements du corps, achetée par Marie-Antoinette qui la remet à l’Académie des sciences.
Versailles est aussi un lieu de présentation. Cet honneur est une sorte de prix Nobel. Villette présente à Louis XIV son Miroir ardent qui permet de vitrifier des briques ou de faire fondre des aciers quasi instantanément ce qui permet d’avancer des hypothèses nouvelles sur la structure des métaux. L’abbé Nollet fait une présentation d’électricité dans la galerie des Glaces, Passemant présente une autre pendule, la Pendule de la création du monde, réalisée pour le roi de Golconde, en Inde. Cassini montre la première carte d’état major afin de récolter des fonds et de poursuivre la cartographie de toute la France. L’expérimentation la plus spectaculaire est l’envol du ballon à air chaud des frères Montgolfier, emportant dans un panier un mouton, un canard et un coq. Le ballon s’éleva à 500 mètres et retomba à Vaucresson, huit kilomètres plus loin, sans dommage pour ses passagers. Ce jour- là se trouvaient à Versailles des délégations étrangères venues signées le Traité de Paris (1783). Cette expérience renforça le prestige du roi et de la France.
Cette exposition, très variée, riche en objets et documents exceptionnels, fort bien présentés, intéressera tout le monde. Château de Versailles 78. Jusqu’au 3 avril 2011. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.chateauversailles.fr.

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