Parcours en images de l'exposition

PHOTOGRAPHIES EN GUERRE

avec des visuels mis à la disposition de la presse
et nos propres prises de vue

Parcours accompagnant l'article publié dans la Lettre n°549 du 8 juin 2022



 

Prologue
Entrée de l'exposition. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1848-2022 - Photographies en guerre

Depuis le siège de Rome en 1849 jusqu'à la guerre en Ukraine en 2022, la photographie s’est progressivement imposée comme un mode privilégié de représentation des conflits armés. Dès le milieu du XIXe siècle, sa capacité à reproduire le réel en fait un outil de documentation réputé pour sa fidélité au sujet représenté. L'essor d'un marché de diffusion spécifique à la photographie, l'abaissement des coûts de production comme de circulation, ainsi que son adoption par la presse illustrée dès les années 1890 l'installent comme le médium le plus à même d'assurer un compte rendu objectif des faits.

Pourtant, dès l'origine, les capacités probatoires des photographies produites en temps de guerre sont mises au service d’usages parfois contradictoires. Utilisées par les belligérants, elles deviennent armes de combat, de persuasion et de communication, ou encore outils de documentation et de renseignement. La lutte armée est aussi une guerre des images dans laquelle la photographie se mue en instrument de légitimation des buts de guerre, de dénonciation des exactions de l'ennemi, quand elle ne sert pas à tromper ou à manipuler. Aux côtés des usages officiels se développent des usages sociaux, plus personnels, grâce à la photographie amateure, qui permet une mise en récit personnelle des conflits, mais offre également un point de vue de l'intérieur qui peut devenir un contrepoint aux discours officiels.

La médiatisation des conflits grâce à la photographie a contribué à révéler les réalités de la guerre au public. Parmi les millions d'images produites par les photojournalistes, certaines restent fixées dans la mémoire et sont devenues des symboles universels qui parfois masquent la grande diversité des photographies produites en temps de guerre.

Qui produit les images? Comment et pourquoi sont-elles diffusées ? Comment sont-elles perçues ? Voici quelques-unes des questions auxquelles cette exposition propose d'apporter des éléments de réponse.

 
Texte du panneau didactique.
 
Émeric Lhuisset. Théâtre de guerre. Photographie avec un groupe de guérilla kurde, 2012. © Émeric Lhuisset / Adagp, Paris, 2021 / Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais.
Carte des principaux conflits mentionnés dans l'exposition.

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1 - 1848-1856 - Premières photographies de guerre

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1848-1856 - Premières photographies de guerre

Le premier photographe de guerre identifié, Stefano Lecchi, opère durant le siège de Rome, de juin à juillet 1849. Il photographie les nouvelles ruines de la Cité éternelle à l’aide du calotype, négatif sur papier pouvant donner lieu à plusieurs tirages, au contraire du daguerréotype. Ces calotypes sont diffusés à travers quelques rares albums, mais surtout sous forme de lithographies.
L'essor de la photographie de guerre se produit à la faveur de la guerre de Crimée (1853-1856), conflit de longue durée engageant les principales puissances européennes. Financés l’un par des subsides gouvernementaux, l’autre par des éditeurs de journaux illustrés, les Britanniques Roger Fenton et James Robertson documentent la vie quotidienne et le théâtre des opérations.

Les Français Jean-Charles Langlois et Léon-Eugène Méhédin d’une part, Jean-Baptiste-Henri Durand-Brager et Lassimonne d'autre part, travaillent à produire la documentation photographique nécessaire à la réalisation de panoramas peints, tout en démontrant les potentialités de la photographie comme médium autonome, tandis que le Transylvain Pap Károly Szathmáry est le seul à photographier des deux côtés de la ligne de front.

 
Texte du panneau didactique.
 
Pap Károly Szathmary. Omer Pacha avec ses aides-de-camps, 1854. © Royal Collection Trust / Her Majesty Queen Elizabeth II, 2019.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Roger Fenton (1819-1869). Groupe de chefs croates, 1855. Épreuve sur papier salé d’après un négatif sur verre au collodion. Paris, musée d’Orsay.
 
Pap Károly Szathmáry (1812-1887). Fantassins turcs, 1854. Épreuve sur papier salé. Windsor, The Royal Collection / Her Majesty Queen Elizabeth II.


2 - 1860-1900 - Naissance d’un nouveau moyen d’information

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1860-1900 - Naissance d’un nouveau moyen d’information

Dès sa création dans les années 1820, la photographie connaît un développement rapide dans les sphères artistiques, scientifiques, techniques et économiques. Au XIXe siècle, son statut est ambigu, au croisement de l'art et de la technique, en raison de sa capacité à conserver les traces du réel.
Reproductible dans la presse uniquement de manière indirecte, par la gravure, la photographie devient un outil à part entière et non plus seulement un auxiliaire au service de la peinture, permettant d'enregistrer pour plus tard. Dans les années 1860, les chambres photographiques restent peu maniables, mais l’arrivée de la technique du collodion sec préparé industriellement facilite la logistique de la prise de vue.
Les photographes investissent les champs de bataille mais documentent la préparation ou le dénouement des conflits plus que leur déroulement : portraits de militaires, vues de camps et de manœuvres, mais aussi ruines, paysages dévastés et, de plus en plus, cadavres de soldats et pas seulement ennemis.

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, un premier système commercial de diffusion de la photographie se met en place. Les images de conflits circulent sous la forme de coûteux albums et la photographie entre dans la sphère privée, grâce au développement du portrait en studio.
 
Texte du panneau didactique.
 
Portrait réalisé pendant le siège de Paris, 1870. Collection Misset-Glain © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Pascal Segrette.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Léon-Eugène Méhédin. Sébastopol : vue de la ville et du port, 1855. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Christian Moutarde.
 
Henri Durand-Brager (1814-1879) et Lassimonne (actif en 1855 - 1856). Le fort Saint-Nicolas avant sa destruction, 1856. Épreuve sur papier albuminé d’après un négatif sur verre au collodion (retouchée). Paris, musée de l’Armée.
 
Jean-Baptiste-Henri Durand-Brager dit Lassimone. Sébastopol. Le fort Nicolas après sa destruction, 1856. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Visionneuse stéréoscopique, 1860. Bois, verre et métal. Rueil-Malmaison, collection Sylvie Gazengel.
 
Alexandre Gardner. Gardner’s photographic sketch book of the war, 1866. © Library of Congress.
 
Charles Winter. Charles Winter (1821-1904) et son laboratoire ambulant dans les ruines du faubourg de Pierre à Starsbourg, 1870. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier.
 
George N. Barnard (1819-1902). Vue photographique de la campagne de Sherman, 1866. Épreuve sur papier albuminé d'après un négatif sur verre au collodion sec. Paris, musée d'Orsay.


3 - 1852-1911 - Photographie et guerres coloniales

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1852-1911 - Photographie et guerres coloniales

L'émergence et la diffusion de la photographie coïncident avec la conquête et l'expansion des empires coloniaux européens en Afrique et en Asie au XIXe siècle. Le développement de la photographie correspond également à l'essor d’une industrie du voyage touristique au milieu du XIXe siècle. La technique se modernise et se simplifie. La baisse du coût du matériel et du développement permet une démocratisation de la pratique. À partir des années 1890, la plupart des expéditions coloniales sont ainsi fixées sur pellicule, et les images obtenues publiées dans la presse.

Dans le contexte colonial, la pratique de la photographie est diffuse et multiple : amateur ou professionnelle, militaire ou civile, appliquée à des usages scientifiques ou de conduite de la guerre, documentaire ou touristique. Elle oscille entre découverte, regard teinté d'exotisme, et manifestation de ce que l’on perçoit et de ce que l'on interprète comme esthétique ou barbare par comparaison avec le monde occidental. Elle est polysémique et questionne la notion d'objectivité : outil de découverte à la fois d'autrui et d'un autre monde, elle permet également de donner à voir la violence coloniale, en qualité de dispositif de conquête du territoire comme d'influence de l'opinion publique.

 
Texte du panneau didactique.
 
Auguste Lancon. Bazeilles derrière le parc en haut de la route de Balan 6 heures soir 1er Septembre 1870. © Paris - Musée de l’Armée. Dist. RMN-Grand Palais / Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Felice Beato (1832-1909). L’exécution de mutins, vers 1858. -1856). Épreuve sur papier albuminé. Londres, National Army Museum.
 
Felice Beato (1832-1909). Intérieur du Secundra Bagh, Lucknow, après le massacre de deux mille rebelles par le 93e régiment d’infanterie (Highlanders), 1858. Épreuve sur papier albuminé. Londres, National Army Museum.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.


4 - 1890-1914 - Démocratisation des pratiques
et développement de la presse illustrée

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1890-1914 - Démocratisation des pratiques et développement de la presse illustrée

La fin du XIXe siècle inaugure une ère de bouleversement dans le compte rendu visuel de la guerre. À partir des années 1880, les progrès de la technique et de la chimie, ainsi que la réduction de la taille et du coût des appareils, contribuent à l'essor de l’utilisation de la photographie. Sur les théâtres d'opération, les militaires côtoient désormais les photoreporters qui alimentent la presse d'information et les agences photographiques, apparues au début du XXe siècle. Avec l'invention de la similigravure, le médium peut désormais être reproduit directement, sans passer par l'étape de la gravure. L'illustration photographique devient un enjeu commercial pour la presse, qui se livre à une concurrence acharnée, notamment par l'intermédiaire des suppléments illustrés. Ceux-ci propagent dans les foyers un nouvel aperçu des événements de guerre : armements, portraits, paysages dévastés, blessés, prisonniers, cadavres, réfugiés... Entre 1880 et 1914, les guerres en Asie, en Afrique ou en Europe voient également les belligérants profiter des nouvelles possibilités offertes par la photographie pour en faire un support de propagande ou de renseignement : elle devient un outil au service de la guerre.
 
Texte du panneau didactique.
 
Scipio Sighele (1868-1913). Arrestation d’espions arabes, 1911-1912. Épreuve gélatino-argentique sur papier. Florence.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
John McCoab (1805-1885). Vue nord-est de la Grande Pagode  (Shwesandaw ou temple de la Relique des cheveux d’or), Bagan, Birmanie, 1852. Épreuve sur papier salé d’après un calotype. Londres, National Army Museum.
 
Gaston Chérau (1872-1937). Les Pendus, 1911. Épreuve gélatino-argentique sur papier. Paris, Bibliothèque nationale de France.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Georg Woltz. Le roi de Bulgarie, Ferdinand Ier (1861-1948), sur les ruines de la forteresse de Cavalla, 1912. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier.
 
L’Illustration, n°3646, 11 janvier 1913. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Anne-Sylvaine Marre-Noël.


5 - 1914-1918 - La  Première Guerre mondiale,
guerre de masse, usages de masse

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1914-1918 - La  Première Guerre mondiale, guerre de masse, usages de masse

Massivement mobilisée par les autorités, les médias et les combattants, la photographie s'impose comme support pour donner à voir la guerre et en conserver le souvenir. Sa capacité à témoigner du « vrai » est au cœur des usages. Associée à de nouveaux moyens comme l’aéroplane, la photographie devient, dès 1914, un outil de renseignement opérationnel et accompagne les manœuvres militaires. La création de services photographiques officiels appuie la propagande d'État et s’assortit d’un contrôle de la production et de la diffusion des images. L'opinion est alimentée en photographies autorisées, qui ne montrent de la guerre que ses aspects les plus acceptables.

La presse illustrée, soucieuse d'offrir à son lectorat des images du front, contourne ce contrôle en se fournissant directement auprès des soldats, qui développent une pratique privée de la photographie en dépit des interdictions. Outils du souvenir et du témoignage, les images d'amateurs servent de support aux liens sociaux et affectifs entre le front et l'arrière, et même entre les combattants. Révélées, réutilisées, réinterprétées ou détournées après la guerre, dans des logiques militantes ou de témoignage, les photographies produites pendant le conflit disent la difficulté du médium à exprimer la réalité de la Première Guerre mondiale.
 
Texte du panneau didactique.
 

Édouard Elias. Donbass, guerre de tranchée. Côté armée ukrainienne, 2017-2018. © Édouard Elias / Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Anne-Sylvaine Marre-Noël.

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Henri Terrier. Photographies de la Grande Guerre. Album du lieutenant Henri Terrier, 1915.
© Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Scénographie
 
T. A. Innes (?- ?) et William Ivor Castle (1877-1947). Pactes avec la mort. Londres, Daily Express Publication, 1934. Imprimé sur papier. Paris, musée de l’Armée.
 
Camera gun Thomson-Pickard Mark III. « Hythe »,1914-1928. Laiton, verre et acier. H. 33 : L. 98 ; Pr. 22 cm. Chalon-sur- Saône musée Nicéphore Niepce.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Anonyme, Section photographique de l’Armée italienne. Photographie de l’album Campagne de guerre 1915-1918. Raid sur Vienne (9 août 1918), 1918. Épreuve gélatino-argentique sur papier, contrecollée sur carton, mise en album. Paris, musée de l’Armée.
 
Anonyme, Section photographique de l’Armée italienne. Photographie de l’album Campagne de guerre 1915-1918. Avion au retour du raid sur Vienne, 1918. Épreuve gélatino-argentique sur papier, contrecollée sur carton, mise en album. Paris, musée de l’Armée.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.


6 - 1920-1939 - L’essor du photojournalisme

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1920-1939 - L’essor du photojournalisme

La figure du photojournaliste, associée à celle du reporter, émerge au tournant du XXe siècle mais ne prend véritablement son essor que dans l’entre-deux-guerres, portée par le développement de la transmission sans fil et des agences de presse, ainsi que de la presse illustrée et du graphisme renouvelé par les avant-gardes.
Le contrôle étatique généralisé de l'information durant la Première Guerre mondiale fait naître une soif d'images supposées brutes. Dans ce contexte, le photographe de guerre apparaît comme celui qui, déjouant la censure, va au-devant du danger pour ramener les images les plus authentiques, immédiates et sincères des conflits. Son éthique et sa déontologie se précisent au fur et à mesure de la codification du métier de journaliste.

L'image photographique, à travers son apparente neutralité, semble être le paradigme de l'objectivité en dépit des photomontages, réemplois et détournements. En célébrant les photojournalistes et leur engagement, les opinions publiques s’affirment, non sans tension envers l'exigence de neutralité. Durant la guerre d'Espagne, le photojournalisme s'impose comme le fer de lance des démocraties face au totalitarisme et l’un des vecteurs de légitimation de la presse.

 
Texte du panneau didactique.
 
Robert Capa. Crowds running for sheiter as the air-raid alarm sounds, Spain, Bilbao, May 1937. © Robert Capa / International Center of Photography / Magnum Photos.
 
Robert Capa (1913-1954). Mort d’un soldat républicain, front de Cordoue, Espagne, début septembre 1936 ou The Falling Soldier, 1936. Épreuve gélatino-argentique sur papier. Paris, agence Magnum.
 
Gerda Grepp. Petit garçon à Malaga, 1936-1938. © Roger-Viollet, 2022.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Jaume Miravitiles (1906-1988). Enfant, victime du bombardement de Getafe le 30 octobre 1936, photographié à l’Institut médico-légal de Madrid, 1936. Épreuve gélatino-argentique sur papier. Nanterre, La Contemporaine.
 
Jean Carlu (1900-1997). Bombes sur Madrid… Civilisation !, 1936-1939. Affiche imprimée sur papier. Nanterre, La Contemporaine.
 
David Seymour, dit « Chim » (1911-1956). Espagne. Région d’Estrémadure. Milicien ou soldat de l’armée républicaine, 1936. Épreuve gélatino-argentique. Paris, agence Magnum.
 
Regards, n°152, 10 décembre 1936. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier.


7 - 1939-1945 - La Seconde Guerre mondiale,
à la conquête de l’opinion publique

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1939-1945 - La Seconde Guerre mondiale, à la conquête de l’opinion publique

La Seconde Guerre mondiale est l’un des conflits les plus massivement documentés et représentés par la photographie. Cette dernière est un outil fondamental dans la conduite des opérations, mais aussi dans la guerre de communication et de propagande que se livrent les belligérants pour justifier le conflit et se rallier le soutien de l'opinion publique internationale. Certaines des images les plus célèbres de la photographie, parmi lesquelles Raising the Flag on Iwo Jima, et Le Drapeau rouge sur le Reichstag ont été prises durant cette période.

Les fonctions de la photographie sont multiples: preuve dans le cadre des procès de criminels nazis après 1945, manière de témoigner ou de résister en tant qu'individu dans une société en conflit, source pour les historiens, motif de réflexion pour les artistes contemporains sur ce que l'on peut montrer et dire des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.
 
Texte du panneau didactique.
 
Evgueni Khaldei. Le Drapeau rouge sur le Reichstag, Berlin, 2 mai 1945. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier / Yevgeny Khaldei, Adagp, Paris, 2022.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Joe Rosenthal. U.S. Marines of the 28th Regiment, 5th Division, raise the American flag atop Mt. Suribachi, Iwo Jima, on Feb. 23, 1945. © National Archives and Records Administration / DR.
 
Julia Pirotte. Maquisards près de Venelles à Sainte-Victoire, 1944. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Marie Bour.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Signal, n°7, avril 1943. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
- Ernst Leitz Gmbh. Appareil Leitz Leica Il, 1932. Métal et verre. Chalon-sur-Saône, musée Nicéphore Niépce.
- Machine à écrire ayant appartenu à Robert Capa. Métal et tissu.
Paris, collection Bernard Matussière.
- Boîte de classement ayant contenu des négatifs de photographies prises par Robert Capa durant la guerre d'Espagne. Carton et papier (négatifs manquants).
Paris, collection Bernard Matussière.
 
Anonyme. Margaret Bourke-White photographiant le commandant des forces américaines terrestres en Europe, 1942. © Archive of Modern Conflict.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Joseph Kuhn (1922-1947). Joseph Kuhn sous la trappe qui permet l’accès à la cache, 1944.
 
Joseph Kuhn. Joseph Kuhn dans sa cache aménagée dans la cave de Triembach, 1944. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Pascal Segrette.


8 - 1946-1975 - Indochine et Vietnam, image contrôlée, image engagée

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1946-1975 - Indochine et Vietnam, image contrôlée, image engagée

La période qui s'ouvre après 1945 correspond à l’âge d'or du photojournalisme, qui culmine avec la guerre du Vietnam. Le paysage est dominé par les agences photographiques (Magnum, créée en 1947, Gamma en 1966, Sygma et Sipa en 1973) ainsi que par les grandes figures qui prolongent le mythe du photojournaliste : Gilles Caron, Don McCullin ou Philip Jones Griffiths. La diffusion du flot d'images prises sur les lieux des conflits, de la guerre froide aux guerres de décolonisation, se fait dans la presse quotidienne, dans les hebdomadaires d'actualité comme Life, Newsweek ou Paris Match, mais aussi grâce à la publication de reportages et de beaux-livres de photographie. La photographie, en noir et blanc ou en couleurs interpelle directement l'opinion publique, qui s'affirme toujours plus comme actrice et cible de la guerre de communication et de propagande que se livrent les belligérants.
En Indochine (1946-1954), le pouvoir colonial contrôle la production des images sur le terrain et dispose de ses propres organes de presse. Lors de la guerre du Vietnam (1954-1975), l'armée américaine laisse une grande liberté aux photojournalistes qui rapportent des images devenues iconiques. L'émergence de la télévision entraîne une révolution médiatique dans le compte-rendu des conflits.

 
Texte du panneau didactique.
 
Fernand Jentile. Opération Atlante n°8. Un sous-officier du 7e GA est tombé dans un piège, deux pointes harponnées ont traversé son pied, 14 mars 1954. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Pascal Segrette / DR.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Philip Jones Griffiths (1936-2008).« C'était un village à quelques kilomètres de My Lai. Il s'agissait d'une opération de routine : les troupes étaient en mission typique de « recherche et destruction ». Après que des hommes qui étaient cachés ont été trouvés et tués, les femmes et les enfants ont été rassemblés. Quang Ngal Vietnam », 1967. Épreuve Lambda sur papier baryté, 2022.
 
Paul Corcuff. Opération mouette ouest de Ninh Binh, 16 octobre 1953. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Pascal Segrette.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Nick Ut. La petite fille au napalm, 1972.

La construction d'une icône

En juin 1972 Nick Ut, jeune reporter d'Associated Press de nationalité vietnamienne, assiste au bombardement au napalm d'un village de la province de Tây Ninh à la suite d'une erreur militaire et immortalise cinq enfants sud-vietnamiens fuyant les flammes. La photographie - qui vaut à son auteur le prix Pulitzer de la photographie d'actualité en 1973 - a été recadrée pour mettre en avant l'une d'entre elles, Kim Phuc, qui court nue, brûlée, et dont la douleur est bouleversante.
Cette image publiée dans la presse puis abondamment reprise, notamment par les mouvements pacifistes, en est venue à symboliser la guerre du Vietnam. Motif répété par des artistes, ou encore débarrassée de tous les éléments qui la rendent identifiable par le photographe Pavel Smejkal, elle reste néanmoins reconnaissable, de portée universelle, confirmant son statut d'icône de la photographie.
 
Pavel Maria Smejkal. 1972, Vietnam, Fatescapes. © Pavel Maria Smejkal / Musée français de la Photographie / Conseil départemental de l’Essonne, Benoît Chain.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Marc Riboud. Jeune fille à la fleur, manifestation contre la guerre au Vietnam, Washington, États-Unis, marche pour la Paix, 21 octobre 1967. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier / Marc Riboud / Fonds Marc Riboud au MNAAG.
 
Jean Péraud (1925-1954). Bataille de Nasan [Na San], l'assaut est donné près du sommet de la colline et l’on en vient au corps à corps avec un ennemi qui se défend avec acharnement, décembre 1952, 1952. Épreuve gélatino-argentique sur papier. Paris, musée de l'Armée.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Page de gauche : « C'est ainsi que le magazine américain Newsweek a présenté en couverture le général Westmoreland, commandant des forces américaines au Sud-Vietnam.»
Page de droite : « Mais cet arrière-plan est bien plus digne de ce bourreau du peuple vietnamien. La photo des victimes de Westmoreland est également reproduite d'un magazine américain.».


9 - 1975-… - Photographier les guerres civiles et le terrorisme

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
1975-… - Photographier les guerres civiles et le terrorisme

Dans les années 1980, la guerre civile au Liban, objet d’une multitude de reportages, suscite une première crise de la représentation. Comment photographier les guerres civiles et le terrorisme? Comment contribuer à l'interprétation lucide de tels événements sans prêter le flanc au voyeurisme, à l'inflation de l'émotion ?
Dans les années 1990, la dislocation de l'Union soviétique ramène la guerre sur le sol européen, remet en cause l’intangibilité des frontières et fait surgir de nouveaux motifs photographiques : ressorts économiques, conséquences sociales, politiques et environnementales, traumatismes individuels et collectifs. Tuant, appauvrissant et déplaçant des millions de personnes, les guerres asymétriques et non conventionnelles se multiplient sur tous les continents.
Ce contexte géopolitique, corrélé à un accès toujours plus immédiat aux images - à travers les réseaux numériques -, favorise une forme d'insensibilisation de l'opinion, voire de discrédit des médias. Photojournalistes et artistes-chercheurs travaillent désormais sur des terrains communs. L'articulation des usages de l'information, de la création et de la recherche permet, par le recours à des dispositifs formels et discursifs rigoureux, de contenir l'horreur dans les rets de la raison.

 
Texte du panneau didactique.
 
« Les martyrs de Beyrouth », Paris Match, n°1797, 4 novembre 1983. Imprimé sur papier. Paris, musée de l’Armée.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Emmanuel Ortiz (né en 1961). Réfugiés albanais du Kosovo entourant un véhicule de le Croix Rouge dans l'espoir d'obtenir de l'eau et de la nourriture, Blace, Macédoine, avril1999. Épreuve par tirage à l'agrandisseur sur papier baryté Forma  Warmtone d'après un négatif original, 2017. Paris, musée de l'Armée.
 
Willy Rizzo (1928-2013). Restaurant grillagé contre les attentats. Saigon, 1952. Épreuve gélatino-argentique sur papier, réalisée sous le contrôle de l’artiste, 2010. Paris, musée de l’Armée.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Yan Morvan (né en 1954). Hossein, capitaine de la milice du secteur de Moalem et membre du PSNS (Parti social nationaliste syrien) pose avec sa femme et ses deux enfants devant l'entrée de sa maison où il vit depuis dix ans. Il présente dans un cadre la photo d’un des martyrs du parti qui a foncé sur un checkpoint israélien du Sud-Liban au volant d’une voiture remplie de dynamite, faisant ainsi plus de trente morts, Beyrouth, de la série La Ligne verte, 1983-1984. Épreuve à destruction de colorants (Cibachrome). Paris, collection Yan Morvan.
 
Pierre Terdjman (né en 1979). Sans titre, de la série Ils nous mettent mal à I‘aise, 2013-2014. Épreuve jet d’encre couleur sur papier Hahnemühle Fine Art Photo Rag, contrecollées sur Dibond, réalisées sous le contrôle de l'auteur, 2022. Paris, collection Plerre Terdman/ Dysturb.
 
Laurent Van der Stockt. La Bataille de Mossoul, 2017. © Laurent van der Stockt / Adagp, Paris 2022.
 
Alfred de Montesquiou (né en 1978) et Emin Özmen (né en 1985). « Syrie, surenchère dans l’horreur », Paris Match, n°3356, 1er septembre 2013. Imprimé sur papier. Paris, musée de l’Armée.


10 - Voir la guerre aujourd’hui

Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Voir la guerre aujourd’hui

Photojournalistes, témoins, acteurs des événements, techniciens et artistes contribuent à l'immense production contemporaine d'images de guerre. Si, dans un processus rhizomique, les frontières entre producteurs d'images deviennent poreuses et les usages se brouillent, la quantité et la qualité des représentations produites viennent enrichir notre rapport au monde. Produites dans le but d'informer et de convaincre, les images réalisées par le photojournaliste Laurent Van der Stockt sont porteuses d’un caractère événementiel et figuratif, perpétuant les valeurs de la photographie de presse.  Cependant, la révolution numérique et les réseaux sociaux questionnent notre perception des images de guerre. Sur les théâtres de conflits, l’image amateur produite par des acteurs, des témoins ou des militants bouleverse l'accès à l'événement autant que les conditions de son attestation. En s'intéressant au hors-champ ou en proposant des mises en forme singulières, de nombreux photographes et artistes renouvellent l'approche de la photographie de guerre : salons d'armement avec Guillaume Herbaut, circulation surabondante des images de guerre avec Lisa Sartorio, documentation de la guerre avec des moyens de renseignement en source ouverte pour Michel Slomka.
 
Texte du panneau didactique.
 
Libération, Les enfants d’Assad, 2017. © Paris - Musée de l’Armée, Dist. RMN-Grand Palais / Émilie Cambier.
 
Guillaume Herbaut (né en 1970). Série Weapon Show, 2012-2018. Six tirages Fine Art, 2022. Montreuil, collection Guillaume Herbaut. Le Qatari pose avec le pistolet semi-automatique 9 mm MKE T 94K et le pistolet mitrailleur 9 mm MP5K sur le stand de la société MKEK (Turquie) au salon Milipol, Doha, Qatar, 2012. Tirage Fine Art, 2022. Montreuil, collection Guillaume Herbaut.
 
Guillaume Herbaut (né en 1970). Série Weapon Show, 2012-2018. Six tirages Fine Art, 2022. Montreuil, collection Guillaume Herbaut. Hôtesses sur le stand OFB (Ordnance Factory Board), Defexpo, New Delhi, Inde, 2012. Tirage Fine Art, 2022. Montreuil, collection Guillaume Herbaut.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Alexander Vasukovich (né en 1985). Série Commémorative Photo, 2014-2017. Impression sur papier dos bleu d'après un fichier numérique. De gauche à droite : les pseudos «Gor», «Tankist», «Kein», «Son» ont été tués, décembre 2015. Photographie d'origine postée sur Facebook le 20 juillet 2014, près d’Artemivsk, région de Donetsk, Ukraine. Minsk, collection Alexander Vasukovich.
 
Laurent Van der Stockt (né en 1964). La Bataille de Mossoul, Irak, 2 juin 2017. Des centaines de civils épuisés fuient en panique Bab Sinjar, Zingjili et Abi Tamam, des quartiers de Mossoul encore aux mains de Daech. Ils traversent la ligne de front dans le fracas des bombes et des échanges de tirs nourris pour rejoindre le quartier d'AI-Sahah, qui est en train de passer sous contrôle des forces spéciales irakiennes. Épreuve sur papier baryté, réalisée sous le contrôle de l'artiste, 2022. Paris, collection Laurent Van der Stockt.
 
Philippe De Poulpiquet (né en 1972). Khazir (Irak). Les peshmergas ont libéré le village de Khazir à quelques kilomètres de Mossoul. Un combattant kurde montre sur son téléphone la photographie d’un djihadiste de Daech abattu, 18 octobre 2016. Épreuve jet d'encre pigmentaire sur papier Fine Art d'après un fichier numérique, 2022. Paris, musée de l'Armée.
 
Guillaume Herbaut (né en 1970). Série Weapon Show, 2012-2018. Six tirages Fine Art, 2022. Montreuil, collection Guillaume Herbaut. Le TOMmanikin sur le stand de l'assistance à la sécurité de l'armée américaine au salon Eurosatory, France, 2016. Tirage Fine Art, 2022. Montreuil, collection Guillaume Herbaut.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
Laurent Van der Stockt (né en 1964). Photographies et documents relatifs à la bataille de Mossoul, Irak, 2 juin 2017. Fond : mosaïque de mille huit cent six images imprimées sur dos bleu/Jetex [voir image précédente]. En haut : Rémy Ourdan (né en 1969) et Laurent Van der Stockt (né en 1964), « Les damnés de Mossoul. L'armée irakienne lutte pour reprendre les derniers quartiers tenus par l’El, que des centaines de civils tentent de fuir », Le Monde, 10 juin 2017, p. 14-15. Article illustré de la photographie La Bataille de Mossoul, Irak, 2 juin 2017 de Laurent Van der Stockt. En bas : quarante-neuf tirages contrecollés sur Forex. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.
 
Document publicitaire provenant d’un salon d’armement international. Imprimé sur papier. Montreuil, collection Guillaume Herbaut.
 
Document publicitaire provenant d’un salon d’armement international. Imprimé sur papier. Montreuil, collection Guillaume Herbaut.
Scénographie. © Paris, musée de l’Armée. Anne-Sylvaine Marre-Noël.