MASCULIN / MASCULIN.
L’homme nu dans l’art de 1800 à nos jours

Article publié dans la Lettre n° 358
du 7 octobre 2013


MASCULIN / MASCULIN. L’homme nu dans l’art de 1800 à nos jours. Une fois de plus le musée d’Orsay présente une exposition « transversale » ce qui lui permet de sortir du cadre « restreint » où il est cantonné, le XIXe siècle. Celle-ci s’inscrit dans le sillage de « nackte männer » présentée en 2012 par le Leopold Museum à Vienne, traitant du même sujet, la représentation de l’homme nu, mais dans un cadre plus limité. Comme le souligne Guy Gogeval, entre autres commissaire de cette exposition, si le nu féminin s’expose régulièrement et naturellement, il n’en est pas de même pour le corps masculin. La présente exposition y remédie en nous montrant l’importance du nu masculin dans l’art, depuis l’antiquité, qui inspira les artistes dès la Renaissance, jusqu’à nos jours.
Le parcours de l’exposition refuse la chronologie et fait se dialoguer les époques sur onze thèmes allant de « l’idéal classique » à « l’objet du désir » en passant par « le nu héroïque », le corps dans toute sa vérité, la nudité comme accomplissement du corps dans « la nature », le corps « dans la douleur », « le corps glorieux », « la tentation du mâle », etc. Quelque 186 œuvres dont 70 peintures, 21 sculptures et 75 photographies, illustrent le sujet. Si le XIXe est bien représenté avec de nombreuses pièces souvent peu connues provenant du musée d’Orsay, des peintures plus anciennes, comme ce Saint Sébastien soigné par Irène à la lanterne de Georges de La Tour, qui nous accueille en guise d’introduction, ou ce Saint Sébastien martyr de Guido Reni (vers 1620), sont également présentes. A l’autre extrémité, nous avons des œuvres d’artistes vivants comme Ron Mueck, Giulio Paolini, Patrick Sarfati, David LaChapelle, Franck Stürmer et surtout Pierre et Gilles qui ont droit à une véritable exposition personnelle avec pas moins de six photographies peintes de grandes dimensions, chacune trouvant sa place dans l’une des sections du parcours.
A partir du XVIIe siècle le corps masculin était un sujet d’étude classique par excellence. Le concours pour le prix de Rome comportait une étude de figure nue et le modèle était un homme. Toutefois, à quelques exceptions près, il a fallu attendre le début du XXe siècle pour que le sexe d’un homme de face apparaisse sans être habilement caché par un accessoire comme il l’est, à titre d’exemple, dans le David triomphant de Delaunay (1874). Au XXe siècle, les artistes n’ont plus ce genre de pudeur et l’homme est représenté dans sa nudité intégrale que ce soit pour le magnifier dans les activités sportives comme le fait Eugène Fredrik Jansson avec son Epaulé-jeté à deux bras (1913), ou simplement dans sa vérité toute nue, comme le font Richard Avedon, Lucian Freud ou Egon Schiele.
D’une manière générale, on voit que les artistes ont magnifié le corps de leurs sujets masculins, y compris dans la photographie. Néanmoins, dans la section intitulée « Sans complaisance », nous voyons un Job de Léon Bonnat (1880), vieux et décharné, une sculpture ultra réaliste de Ron Mueck représentant son Père mort (1997), à l’échelle deux-tiers, et surtout le projet (1894) de Rodin pour son Balzac qu’il représente nu, ce qui n’atténuait pas l’impression de puissance et de grandeur de l’écrivain. Ce projet ne fut pas réalisé et après bien des vicissitudes c’est un Balzac drapé dans un grand manteau que l’on peut admirer aujourd’hui. Un cartel met en garde les visiteurs à l’entrée de la section intitulée « La tentation du mâle ». En effet nous y voyons là aussi des hommes nus, mais dans des situations évoquant l’homosexualité. Citons Le Bain (1951) et Finistère (1952) de Paul Cadmus, Visite aux bains mystérieux I (1935) de Giorgio De Chirico et surtout Les Amants (1947) de Jean Cocteau. Placé au-dessus de toutes les autres œuvres de cette section, nous avons l’étonnant L’Origine de la guerre (1989-2012) d’Orlan, pendant masculin à L’Origine du Monde de Courbet. A part une allusion symbolique dans une épreuve chromogène de David LaChapelle, Eminem : About to Blow (1999), les éventuels voyeurs en seront pour leurs frais dans cette très intéressante exposition ! Musée d’Orsay 7e. Jusqu’au 2 janvier 2014.
Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.musee-orsay.fr.


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