LE KAMA-SUTRA
Spiritualité et érotisme dans l’art indien
Article
publié dans la Lettre n° 374
le
17 novembre 2014
Pour voir le parcours en images de l'exposition, cliquez ici.
LE KAMA-SUTRA. Spiritualité et érotisme
dans l’art indien. C’est la première exposition organisée sur
ce joyau de la littérature indienne, incorrectement présenté le
plus souvent comme un ouvrage pornographique. La tradition rapporte
que Nandi, taureau servant de monture au dieu Shiva (en Inde tous
les dieux ont une monture sacrée), consigna le son sacré des ébats
amoureux de Shiva et de son épouse Parvati. Au cours du VIIIe siècle
avant notre ère, le sage Shvetaketu résuma le texte transmis par
Nandi. Ses écrits furent ensuite reproduits et diffusés par des
érudits jusqu’à ce que Vâtsyâyana rédige le Kâma-Sûtra, au IVe siècle
de notre ère. Ce dernier prétend lui-même avoir repris les écrits
de sept sages.
Le Kâma-Sûtra se réfère au kâma, troisième pilier de l’hindouisme,
l’une des plus anciennes religions ou plutôt philosophies de vie
indiennes. Les deux premiers piliers concernent les premières années
de la vie (dharma) et l’installation de l’être humain dans
sa vie d’adulte (artha). Le quatrième et dernier pilier (moksha)
correspond au but ultime : être délivré de la mort, de la vie et
détaché de soi. Le kâma est donc l’étape où l’être prend conscience
de sa vie intérieure, qu’il maîtrise, et aspire à atteindre le moksha.
On mesure donc l’importance religieuse de cet ouvrage. Celui-ci
est divisé en sept livres et 36 chapitres. Les livres traitent des
« Méditations », de « L’Art de faire l’amour », de « L’Art de faire
la cour et du mariage », de la « Conduite de l’épouse », de la manière
de « Séduire les femmes des autres », de la « Courtisane » et des
« Aphrodisiaques et des charmes ». La lecture de ces titres montre
que les fameuses positions érotiques ne sont qu’une partie de l’ouvrage.
Celui-ci est un véritable code de conduite, allant jusqu’à expliquer
comment commettre un adultère, surtout si le mari ne satisfait pas
sa femme ! L’homosexualité et la zoophilie ne sont pas absentes
non plus, surtout pour une religion où les dieux peuvent être des
animaux comme Nandi (taureau) ou Ganesh (éléphant).
Le parcours de l’exposition, après une introduction sur le Kâma-Sûtra,
l’hindouisme et les dieux, reprend l’ordre des sept livres en question
pour présenter, avec de nombreux panneaux très explicites, quelque
330 œuvres de toute nature : sculptures, peintures, objets divers,
tels des Lingams, représentations phalliques de Shiva, ou des casse-noix
de bétel. A côté de quelques sculptures anciennes, la plupart des
œuvres datent de la fin du XIXe ou du début du XXe siècle et ont
sans doute été faites, parfois en grande quantité grâce à la technique
du poncif (dessin perforé sur papier), pour la clientèle britannique.
Il n’en reste pas moins qu’elles sont inspirées par le fameux livre
2 du Kâma-Sûtra. Une exposition aussi inattendue qu’exceptionnelle.
Pinacothèque de Paris 8e. Jusqu’au 11 janvier 2015. Lien
: www.pinacotheque.com.
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