INGRES
(1780-1867)
Article
publié dans la Lettre n° 254
INGRES (1780-1867). Avec 79 tableaux
et 101 dessins provenant du monde entier, cette rétrospective, la
première depuis quarante ans, porte un nouveau regard sur ce peintre
inclassable, représentant du néo-classicisme davidien pour les uns,
extravagant pour les autres, alors qu'il se considérait lui-même
comme un « révolutionnaire », mais un révolutionnaire
de l'intérieur. Pour Baudelaire Ingres était «l'homme audacieux
par excellence» et cette exposition le montre bien. Toutes
les périodes de sa vie d'artiste sont illustrées et le parcours
chronologique décrit parfaitement son évolution depuis le primitivisme
des années de jeunesse jusqu'à ces derniers nus, si controversés.
Après les deux immenses toiles exposées dans la rotonde, Jupiter
et Thétis (1811) et Le Songe d'Ossian (1813-1835) nous
commençons la visite par ses années de jeunesse. Né en 1780 à Montauban,
d'où proviennent un grand nombre d'œuvres prêtées par le musée qui
lui est consacré, il entre en 1797 dans l'atelier de David. En 1801
il remporte le prix de Rome avec Achille et les ambassadeurs
d'Agamemnon, où sa sensualité est déjà présente. Au salon de
1806 il expose les portraits de la famille Rivière et surtout l'immense
portrait de Napoléon 1er sur le trône impérial. Contrairement
à son attente il fut très critiqué, tant par l'administration impériale
que par la presse qui le tourna en ridicule.
Cette même année il rejoint la villa Médicis où il copia, entre
autres, les maîtres de la Renaissance italienne et en particulier
Raphaël, qu'il admirait, tout comme Léonard de Vinci ou Giorgione.
C'est là qu'il réalise ses premiers grands nus féminins, La Baigneuse
Valpinçon dite La Grande Baigneuse (1808) et surtout la Grande
Odalisque (1814) qui fascine toujours autant malgré une morphologie
improbable ! Malmené en France, Ingres décide de rester en Italie
après la chute de Napoléon. Il peint pour Louis XVIII Roger délivrant
Angélique (1822). Pendant toute cette période, il réalise de
nombreux portraits de ses amis et des fonctionnaires ou diplomates
en poste en Italie, faisant ressortir tout autant les charmes de
son sujet (Madame de Senonnes, 1815) que leurs travers (Portrait
du comte Gouriev, 1821). Il aborde aussi un genre très en vogue,
la peinture de goût troubadour, avec des toiles telles que La
mort de Léonard de Vinci (1818).
Après le grand succès au salon de 1824 du Vœu de Louis XIII,
Ingres se décide à revenir en France. Il peint d'immenses toiles
comme l'Apothéose d'Homère (1827) et des portraits comme
celui de Monsieur Bertin (1832). Mais son Martyre de Saint-Symphorien
(1834) est étrillé par la critique et l'artiste pose sa candidature
pour prendre la direction de l'Académie de France à Rome où il retourne
l'année même.
Malgré le temps qu'il doit consacrer à sa tâche il trouve celui
de peindre : Vierge à l'hostie, Odalisque à l'Esclave
(1839-1840), de faire aussi le portrait de ses élèves et de leurs
famille et de jouer du violon en virtuose, d'où l'expression «
le violon d'Ingres ». Son violon est d'ailleurs exposé à coté
des portraits des grands musiciens qu'il admirait comme Paganini
(1819) ou Franz Liszt (1839).
En 1841 l'artiste revient en France et achève le portrait du
duc d'Orléans (1842), héritier du trône, lorsque ce dernier
meurt accidentellement. On lui commande alors les cartons des vitraux
des chapelles commémoratives élevées à la mémoire du défunt, à Paris
et à Dreux. Puis il consacre beaucoup de temps à un immense décor
pour le château de Dampierre, l'Age d'or, jamais terminé
mais dont il reste un grand nombre de travaux préparatoires qui
sont exposés. Jusqu'en 1855 il continue aussi à peindre des portraits
qui sont parmi les plus impressionnants du genre par l'expression
des personnages, le rendu des étoffes et des matières, les coloris.
Citons le portrait de Madame Moitessier (1851) ou celui de
la Princesse de Broglie (1853) parmi bien d'autres.
Arrive alors en 1855 la consécration d'Ingres, de son vivant, avec
une rétrospective organisée à l'Exposition universelle. Le maître
continue son travail et tout particulièrement son étude du nu féminin
(La Source, 1820-1856), se permettant toutes les audaces
jusqu'à ce foisonnement de nus impudiques dans le fameux Bain
turc (1859-1863) qui clôt cette brillante et passionnante rétrospective.
Musée du Louvre 1er (01.40.20.53.17) jusqu'au 15 mai 2006.
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Lien : www.louvre.fr.
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