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 EDWARD HOPPERArticle 
              publié dans la Lettre n° 347du 
              10 décembre 2012
 
 EDWARD HOPPER. C’est la première rétrospective 
              de ce grand peintre américain (1882-1967) organisée en France. La 
              présentation est chronologique et même pédagogique tant la scénographie 
              met bien en évidence les différentes époques de sa carrière, avec 
              des panneaux très clairs à l’entrée de chaque salle. Si tout le monde connaît Hopper grâce aux reproductions de ses toiles 
              les plus fameuses, il était intéressant de comprendre la genèse 
              de son art à partir du début du siècle dernier. Il se forme dans 
              l’atelier de Robert Henri qui sera, en 1908, le fondateur de l’Ashcan 
              School (l’école de la poubelle), qui adopte un parti pris de 
              réalisme sans concession. En 1906 Hopper passe près d’un an à Paris 
              et y revient en 1909 et 1910. Il découvre des œuvres aussi différentes 
              que Un bureau de coton à la Nouvelle-Orléans de Degas (1873), 
              Le Quai Bourbon d’Albert Marquet (1908), Femme nue se 
              regardant dans une psyché de Vallotton (1906), The Eldorado, 
              Paris de Walter Sickert (1906), ainsi que les impressionnistes. 
              Tous seront sources d’inspiration pour ses thèmes et son style. 
              Didier Ottinger, commissaire de cette exposition, nous présente 
              donc des toiles de ces artistes en regard de celles peintes par 
              Hopper à ses débuts.
 Pour vivre, Hopper pratique l’illustration commerciale (1906-1914). 
              Les commandes portent sur des sujets comme la bureaucratie américaine, 
              la vie rurale, le bonheur des loisirs. Un grand nombre d’entre elles 
              sont projetées en vidéo et quelques-unes sont exposées. Comme on 
              le verra plus tard, ces thèmes se retrouveront dans ses peintures. 
              En 1915, il s’intéresse à la gravure. C’est elle qui provoque cette 
              métamorphose à l’issue de laquelle sa peinture se « cristallise », 
              selon son expression. Jusqu’en 1928 il ne fera que 26 gravures dont 
              22 sont exposées ici. Les sujets sont déjà un phare à coté d’une 
              maison (The Lighthouse, 1919-1923), des gens prenant le soleil 
              devant de riches demeures (Summer Twilight, 1920), une femme 
              dans une chambre (Evening Wind, 1921), un voilier (The 
              Catboat, 1922), etc.
 Mais le tournant de sa vie arrive avec l’aquarelle, en 1924. Alors 
              qu’il n’avait vendu qu’un seul tableau jusque là, lors de l’Armory 
              Show en 1913, Hopper vend les sept aquarelles qu’il présente 
              dans une exposition collective. Il renonce alors à l’illustration 
              pour ne se consacrer qu’à son art. Une quinzaine d’aquarelles, dont 
              certaines de celles peintes à Gloucester (en Nouvelle-Angleterre) 
              qui le firent connaître (House at the Fort, Gloucester, 1924), 
              nous sont présentées dans deux salles.
 Nous arrivons enfin devant les toiles que l’on attendait. L’accrochage 
              est sobre et aéré. Nous avons tout loisir d’admirer des œuvres d’apparence 
              réaliste, dont les sujets avaient souvent été déjà traités en gravure : 
              House by the Railroad (1925) dont Hitchcock s’inspira pour 
              sa maison de Psychose (1960) ; Lighthouse Hill (1927) ; 
              Ground Swell (1939) ; Summertime (1943). Il est facile 
              de voir quels sont les thèmes de prédilection de l’artiste : les 
              constructions vues sous des angles originaux (The City, 1927) 
              comme ceux de Marquet ; les sports tels que la voile, le cheval 
              (Bridle Path, 1939) ou le cyclisme (French Six-Day Rider, 
              1937) ; les activités humaines avec la vie de bureau (Office 
              at night, 1940 ; New York Office, 1962) ou les voyages 
              (Gas, 1940) ; les spectacles (The Sheridan Theatre, 
              1937 ; Girlie Show, 1941) ; les hôtels (Hotel Room, 
              1931 ; Hotel Lobby, 1943) et, d’une manière générale, la 
              vie quotidienne des classes moyennes, avec des personnages esseulés 
              et mélancoliques.
 Dans certains de ses tableaux, il revisite les œuvres qu’il a vues 
              au Louvre. C’est le cas avec Hotel Room (1931) construit 
              comme la Bethsabée au bain tenant la lettre de David, de 
              Rembrandt (1654) et surtout Two Comedians (1966), son dernier 
              tableau, qui évoque inévitablement le Pierrot (Gilles) de 
              Watteau (1719), deux tableaux qu’il avait admirés durant ses séjours 
              à Paris. Une exposition captivante qui nous présente, avec 163 œuvres 
              dont 128 de Hopper, l’essentiel de la production de cet artiste 
              majeur du vingtième siècle, souvent comparé, par son style, à De 
              Chirico. Grand Palais 8e. Jusqu’au 28 janvier 2013. Pour 
              voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien 
              : www.rmn.fr.
 
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