DOGON

Article publié dans la Lettre n° 328
du 13 juin 2011


DOGON. Avec cette exposition sur un peuple dont le nom est évocateur de tous les mystères de l’Afrique, Hélène Leloup, galeriste et spécialiste de l’art dogon, commissaire de cette exposition, a voulu restituer toute la force de l’art et de la sculpture telle que l’ont conçue les Dogon, qu’il s’agisse du bois ou du métal, de pièces imposantes ou de puissants objets de petites dimensions.
Les Dogon habitent le Mali, pays subsaharien situé sous l’Algérie entre le Niger et la Mauritanie, dans une région qui s’étend de la frontière du Burkina Faso, au sud, au fleuve Niger, au nord. Cette région, couramment appelée aujourd’hui Pays Dogon, portait le nom de plateau dogon, puis de falaise de Bandiagara. Elle a été peuplée dès le Xe siècle. C’était alors un territoire luxuriant, idéal pour fuir les guerres ou les famines, jusqu’à la grande sécheresse du XIIIe siècle. Aujourd’hui c’est une région aride peuplée de 400 000 habitants. Aux populations autochtones présentes au Xe siècle (Tombo, Tellem et Niongom) se sont superposées deux migrations importantes, les Djennenké au XIe siècle, fuyant la menace de la dynastie berbère des Almoravides, puis les Dogon-Mandé, au XIVe siècle, fuyant l’islamisation de leur territoire et les enlèvements par les esclavagistes.
Lieu de rencontre et d’échange, le plateau dogon a donné naissance à une production artistique riche et multiple qui évolue au cours des siècles. De même la géographie de cette région avec son relief varié et le relatif isolement des habitants a permis à des écoles d’artistes de développer divers styles qui leur sont propres et qui sont présentés ici, bien séparés les uns des autres, ce qui permet aux profanes que nous sommes de comprendre les différences. L’exposition commence, sous le titre « un art immémorial », par une présentation de statues dogon, classées selon les différentes cultures du plateau (Djennenké, N’Duleri, Tombo, etc.). Les thèmes les plus courants sont des représentations humaines : cavaliers, maternités, hermaphrodites personnifiant l’idéal de réunion des deux sexes, personnages aux bras levés implorant le dieu Amma pour l’obtention de la pluie. Elles sont sculptées dans un bois dur, destiné à perdurer. Certaines portent une patine rituelle épaisse. La technique du carbone 14 a permis de dater ces pièces. Leur âge va du Xe au XIXe siècle, ce qui montre l’ancienneté de cet art. Ces statues servent de réceptacle pour le nyama des morts (l’énergie vitale de chaque individu) lorsqu’elles représentent un ancêtre ou son statut social. D’autres sont utilisées contre les maladies, en particulier la stérilité.
La section suivante est consacrée à la « société des masques », objets des premières études, dès 1904, par Louis Desplagnes. Ces masques sont d’une très grande diversité. C’est ainsi qu’en 1938, le grand spécialiste des Dogon, l’ethnologue Marcel Griaule, dénombra 68 types de masques ! Ils étaient utilisés dans des fêtes religieuses dont certaines n’avaient lieu que tous les 60 ans. Ces traditions sont toujours vivantes et modernisées, pour le plus grand bonheur des touristes, tant africains qu’occidentaux.
Une dernière section, « le temps de la collection », nous montre toutes sortes d’objets de la vie courante (140 en tout). Nous voyons ainsi de magnifiques exemples de coupes, de bijoux, de portes, de serrures, de piliers de maison, de métiers à tisser etc., dont la décoration reprend parfois celle des statues du début.
Une exposition passionnante, riche de plus de 350 œuvres exceptionnelles issues de collections du monde entier, bien illustrée et documentée, nous expliquant aussi la religion traditionnelle, qui s’appuie sur une cosmogonie et un mythe d’une surprenante richesse, sous-tendant l’ensemble des coutumes et de l’art dogon. Musée du quai Branly 7e. Jusqu’au 24 juillet 2011. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.quaibranly.fr.


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