CEZANNE ET PISSARRO (1865-1885)

Article publié dans la Lettre n° 255


CEZANNE ET PISSARRO (1865-1885). Conçue par Joachim Pissarro, conservateur au Museum of Modern Art de New-York et arrière petit-fils du peintre, cette exposition rend compte avec maints exemples de l'influence réciproque de ces deux peintres, ayant chacun une grande estime pour l'autre. Ils s'étaient connus en 1861 dans l'atelier du peintre Suisse et leur amitié allait être profonde et durable. Pissarro s'était installé en 1872 dans la région de Pontoise et d'Auvers sur Oise, où les loyers étaient moins chers qu'à Paris et la vie plus calme, loin des travaux qui transformaient la capitale, et Cézanne venait travailler dans l'atelier de son aîné de neuf ans. Pissarro incita son ami à éclaircir sa palette sombre, caractéristique de ses œuvres de jeunesse. Alors que Sisley et Monet, qui avait choisi Argenteuil dès 1871, étaient attirés par l'eau, Pissarro et Cézanne l'étaient par la campagne. Un grand nombre de leurs peintures représentent des paysages avec des villages traditionnels, des routes tortueuses, des maisons anciennes, des coteaux, des vallons, des sous-bois. En revanche alors que Pissarro introduit souvent une note vivante dans ses paysages, des paysans par exemple, ceux de Cézanne sont toujours déserts. Déjà ce dernier était passé maître dans l'analyse d'un paysage pur et avait transmis à Pissarro son aptitude à construire de tels sujets.
L'exposition, riche d'une soixantaine de peintures et de quelques oeuvres graphiques provenant du monde entier est organisée selon un parcours thématique respectant l'ordre chronologique. Chaque peintre est également représenté et plusieurs œuvres sont présentées en paires où s'expriment les correspondances et interférences entre les deux artistes. On reconnaît les mêmes maisons dans le Potager, arbres en fleurs, printemps, Pontoise de Pissarro et le Jardin de Maubuisson, Pontoise de Cézanne, tous deux peints en 1877. Même correspondance dans la Nature morte à la bouilloire de Cézanne, vers 1869 et la Nature morte de 1867 de Pissarro. Même leurs autoportraits sont conçus de la même façon, en buste de trois-quarts, dans leur atelier devant des tableaux ! Le summum est atteint avec leurs vues de Louveciennes, présentées cote à cote mais il s'agit cette fois d'une copie par Cézanne, en 1872, du tableau de Pissarro de 1871. Vers la fin, la rupture picturale est évidente. Pissarro continue à peindre des paysages animés aux formes fluides tandis que Cézanne « construit » de plus en plus les siens.
Pissarro écrira à son fils Lucien en 1895, après avoir vu les tableaux de Cézanne regroupés dans sa galerie par Ambroise Vollard : « Cézanne a subi mon influence à Pontoise et moi la sienne. Ce qu'il y a de curieux, c'est la parenté qu'il y a dans certains paysages d'Auvers, Pontoise et les miens. Parbleu, nous étions toujours ensemble ! Mais ce qu'il y a de certain, chacun gardait la seule chose qui compte, " sa sensation ", ce serait facile à démontrer. » Cette exposition est une magnifique illustration de ce propos. Musée d'Orsay 7e. Jusqu'au 28 mai 2006. Pour voir notre sélection de diapositives, cliquez ici. Lien : www.musee-orsay.fr


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