CEZANNE EN PROVENCE

Article publié sur Internet entre les Lettres 258 et 259


CEZANNE EN PROVENCE. C'est en 1936 que le spécialiste américain de Cézanne, John Rewald, suggère de commémorer à Aix en Provence, le centenaire du plus illustre de ses enfants, Cézanne donc. Il parle évidemment du centenaire de sa naissance et ce n'est que cette année que la ville rend enfin l'hommage auquel le père de la peinture moderne a droit, en organisant une multitude de manifestations durant toute l'année 2006, pour le centenaire de sa mort. Parmi celles-ci, l'exposition organisée sur le thème des rapports quasi charnels entre Cézanne et la Provence en est le point fort. C'est ainsi qu'après Washington, nous pouvons admirer quelque 85 peintures et 32 aquarelles, beaucoup de ces dernières étant encore en des mains privées, provenant d'une quinzaine de pays du monde entier, toutes inspirées par la Provence.
Cette exposition marque aussi la réouverture du Musée Granet avec plus de 4500 m2 dévolus à la présentation des œuvres alors qu'il n'en comptait que 1000 lors de sa fermeture pour travaux en 2003.
Le parcours de l'exposition est organisé par thèmes, ce qui facilite la compréhension de l'œuvre, permet les comparaisons (les innombrables Montagne Sainte Victoire) et donne envie d'aller sur les lieux qui inspirèrent ces tableaux.
La première salle est consacrée au Jas de Bouffan, la grande demeure de son enfance où il fait ses débuts, dans la tradition des paysagistes anglais ou italiens. Grand marcheur, il part déjà sur les routes à la recherche de ses sujets, La Route tournante en Provence, 1866. La seconde poursuit ce thème avec des vues du vaste parc, une vue de la maison, Maison au toit rouge, 1885-1886, et des portraits de ses habitants, Louis-Auguste Cézanne, père de l'artiste, lisant « l'Evénement », 1866 ; Portrait de l'artiste au fond rose, 1875.
Après deux salles consacrées aux aquarelles avec divers paysages de la région d'Aix et quelques personnages, nous arrivons à l'Estaque avec huit toiles peintes entre 1876 et 1885, année où il cessa de venir dans ce petit port de la baie de Marseille où les constructions commençaient à dénaturer ce lieu autrefois idyllique, Le Golfe de Marseille vu de l'Estaque, 1885.
Les sixième et septième salles sont consacrées à Bellevue et Gardanne, durant la période 1185-1895 environ. En 1896 Cézanne épouse Hortense Piquet et se coupe du milieu artistique en décidant de s'installer en Provence. Sa peinture évolue vers une monumentalité et une rigueur intransigeante qui le conduit à détruire les œuvres qui le laissent insatisfait. Son travail des formes, leur imbrication, leur structure seront repris par Braque, Picasso et Derain. A coté de neuf paysages, La Maison de Bellevue, 1890, dont deux Montagne Sainte Victoire, on voit aussi un nu, Bethsabée (1885-1890).
La huitième salle est consacrée aux « Arbres, forêts et chemins ». Cézanne n'est plus un peintre inscrit dans une tradition d'imitation de la nature, il compose et construit des paysages, certes reconnaissables, mais ce qu'il entend peindre c'est un équivalent artistique à la nature, La Route en Provence, 1890-1892.
La neuvième salle nous montre des portraits et des natures mortes au Jas de Bouffan, dont Les Joueurs de cartes du Musée d'Orsay, 1890-1899, l'un des cinq tableaux sur ce thème, et Madame Cézanne dans la serre, 1891-1892, l'un des rares portraits de son épouse, dont il aurait dit qu'elle posait comme une pomme !
Nous revenons, avec la dixième salle, aux paysages avec le Château Noir, bâtisse du XIXe siècle dans un site rocailleux et la carrière de Bibémus, déjà abandonnée et offrant à Cézanne la tranquillité pour peindre un « Palais à ciel ouvert » avec en arrière plan la Montagne Sainte Victoire, Château Noir, 1900-1904.
Nous voici maintenant, salle suivante, à l'atelier des Lauves, où Cézanne venait chaque jour à pied (il n'y vécut pas). L'artiste le fit construire en 1902, spécialement pour pouvoir réaliser ses « grandes baigneuses ». Ce sujet le préoccupa beaucoup et il y travailla énormément, d'après des esquisses, des dessins d'antiques, sa mémoire, son inspiration, réalisant ce dont il rêvait, Les Grandes Baigneuses, 1894-1905, Londres. A l'atelier des Lauves il peint également son jardinier et des natures mortes, dont la fameuse Trois crânes sur un tapis d'orient, 1904, l'artiste étant sans doute inspiré par une mort prochaine.
Enfin, la dernière salle est tout entière consacrée à la Montagne Sainte Victoire qui devint, non plus l'horizon dans un tableau mais le sujet même du tableau, ne semblant exister que pour son peintre. Elle est présente dans plus de 80 œuvres, de 1870 à 1906, dont 40 huiles. Lorsque Picasso s'installe au château de Vauvenargues sur le versant nord de la montagne, il dit à son marchand : « Je viens d'acheter la Sainte-Victoire de Cézanne ». « Laquelle ? », répond le marchand. « L'originale », réplique Picasso ! Une exposition éblouissante, qui vaut le voyage et les files d'attente pour ceux qui n'ont pas pu réserver. Musée Granet, Aix en Provence 13 (04.42.52.88.32) jusqu'au 17 septembre 2006. Pour voir notre sélection de diapositives, cliquez ici.
Lien: www.aixenprovencetourism.com.


Retour à l'index des expositions

Nota: pour revenir à « Spectacles Sélection » il suffit de fermer cette fenêtre ou de la mettre en réduction