PIERRE BONNARD (1867-1947)
Peindre l’Arcadie

Article publié dans la Lettre n° 383
le 25 mai 2015

 
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PIERRE BONNARD (1867-1947). Peindre l’Arcadie. Après les expositions de 1967 à l’Orangerie des Tuileries, de 1984 au Centre Pompidou et de 2006 au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris (Lettre 253), cette rétrospective nous offre une vision plus exhaustive de l’œuvre de cet artiste longtemps méprisé par la critique. En charge de la gestion de son œuvre, le musée d’Orsay, riche de 87 peintures et de centaines de dessins et photographies de l’artiste, se devait de lui rendre cet hommage. C’est chose faite avec une centaine de tableaux et près de cinquante photographies. Bonnard aime le décoratif et l’assume. Dès le début du parcours nous avons les quatre grands panneaux de « Femmes au jardin » peints en 1890-1891. Ensuite le parcours se déroule en neuf sections, selon un ordre thématique sans souci de chronologie. Nous avons ainsi « Un nabi très japonard, Faire jaillir l’imprévu, Intérieur, Histoire d’eau, Clic clac Kodak, Portraits choisis, Le jardin sauvage, Bonnard en Normandie, Ultra-violet et Et in Arcadia ego ».
Dès ses débuts, l’influence du Japon est flagrante avec le cloisonnement des formes, les aplats de couleurs vives, la perspective étagée (Femme au chien, 1891) qui lui valent le surnom de « Nabi très japonard » (Félix Fénéon) ! En effet avec ses amis de l’Académie Julian tels Edouard Vuillard (Lettre 217), Maurice Denis (Lettre 263) et quelques autres, Bonnard fait partie du groupe des « Prophètes » ou « Nabis ». Il s’attache exclusivement à l’art et non à la réalité dont il est absent, aussi bien lors de la première guerre mondiale que de la seconde. Ce n’est pas un artiste engagé. Il a ainsi une vision arcadienne du monde, où l’on est censé vivre dans la paix et le bonheur, centrée sur sa vie personnelle, sa famille, sa compagne, ses maîtresses, ses lieux de résidence, etc. sans oublier ses autoportraits à toutes les époques de sa vie.
Proche d’Alfred Jarry, il en a l’humour comme le montrent ses toiles où il introduit des éléments incongrus, des angles de vue inattendus (Danseuses, vers 1896) ou des compositions inquiétantes (L’Indolente, 1899). Bonnard aime peindre aussi des intérieurs avec ou sans personnages, adoptant là aussi des angles de vues originaux ou des compositions savantes avec, par exemple, des jeux de miroirs (La Cheminée, 1916). Il aime aussi les scènes de salles de bains avec des nus posés par Marthe, sa compagne, puis épouse, ou d’autres modèles. Ces nombreuses scènes sont fortement colorées et éclairées, et teintées d’érotisme. Il fait également preuve d’originalité dans ses portraits où il montre parfois des personnages opposés comme Misia et Thadée Natanson à l’époque de leur divorce ou sa maîtresse et sa compagne (Jeunes femmes au jardin, 1921-1923), créant un sentiment de malaise. Ses extérieurs débordent également de couleurs. Il peint depuis le balcon de sa maison de Normandie, baptisée « Ma Roulotte » ou dans le jardin de la maison qu’il achète au Cannet en 1926 et qu’il baptise « Le Bosquet ». Le midi l’enchante et ses compositions se parent de toutes les nuances de jaune qui s’opposent à un bleu intense (L’Enlèvement d’Europe, 1919). Le parcours s’achève avec d’immenses compositions comme le triptyque La Méditerranée (1911) ou Jeux d’eau (1906-1910) et une douzaine d’autres tout aussi impressionnantes. Une très belle exposition bénéficiant d’une excellente scénographie d’Hubert Le Gall. Musée d’Orsay 7e. Jusqu’au 19 juillet 2015. Lien : www.musee-orsay.fr.


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