BEAUTE, MORALE ET VOLUPTE
DANS L’ANGLETERRE D’OSCAR WILDE

Article publié dans la Lettre n° 330
du 3 octobre 2011


BEAUTE, MORALE ET VOLUPTE DANS L’ANGLETERRE D’OSCAR WILDE. Cette exposition est consacrée à ce mouvement, que l’on nomma Aesthetic Movement, qui suivit celui des préraphaélites après l’effondrement de ce dernier, dans les années 1850. Il surgit au milieu du XIXe siècle, au Royaume-Uni, alors en proie à une cacophonie de styles et de théories sur l’art et le design. Ceux que l’on appellera les Esthètes se lancent alors dans la création d’une nouvelle forme d’art, libérée d’idées culturelles et de codes moraux jugés désuets dans cette Angleterre victorienne. C’est l’avènement de « l’art pour l’art ».
Les premières figures de ce mouvement sont les peintres Dante Gabriel Rossetti, James McNeill Whistler, Frederic Leighton, G.F. Watts ainsi que « l’artisan d’art » William Morris et l’architecte Philip Webb. A la recherche d’une nouvelle beauté dans les années 1860-1870, les esthètes, s’efforçant de donner vie au monde rêvé de leurs peintures et poèmes, se tournent vers la décoration d’intérieur et la création de meubles peints, en commençant par leurs propres maisons. Leurs créations, qui touchent tous les domaines - papier peint, broderie, ferronnerie, faïence, vitrail, livre, etc. - suscitent une reconnaissance élargie du besoin de beauté dans le quotidien. Leurs créations originales, dont certaines sont produites en séries par des fabriques d’art, comme celle de E.W. Godwin par exemple, remplacent le mobilier victorien banal dans la classe moyenne, tandis que les gens fortunés (vieille aristocratie, nouveaux entrepreneurs) commandent des réalisations uniques, comme la Pièce des paons, décorée par Whistler, qui abritait la collection de porcelaines bleues et blanches de Chine, de Leyland. Ce mouvement puise son inspiration dans des exemples issus de périodes et de pays lointains. C’est le cas de la Grèce antique, où l’on vient de découvrir l’or de Troie, de la Chine et même du Japon, qui vient de s’ouvrir au reste du monde, en 1854, par la convention de Kanagawa. Les artistes étudient minutieusement ces objets japonais et découvrent en eux de nouvelles formes de beauté. Dans les années 1870, les principaux artistes de l’Aesthetic Movement évoluent vers une nouvelle forme de peinture, exquise, dans laquelle l’harmonie de couleurs et la beauté de forme priment, tandis que le sujet ne joue qu’un rôle mineur, voire inexistant.
Morris déclare, en 1883, « N’ayez rien dans votre demeure que vous ne pensiez utile ou beau. » C’est à quoi s’emploie cette exposition qui nous présente, regroupés par thèmes, près de 250 objets de toutes sortes : tableaux, sculptures, photographies, meubles, vitraux, décors, papiers peints, bijoux, vêtements et accessoires, livres, etc. Parmi ceux-ci on remarque, entre autres, un exceptionnel portail en fer forgé, magnifique, et quelques chefs d’œuvre de la peinture comme Le Bain de Psyché de Lord Leighton ou des portraits et « Nocturnes » de Whistler. Certaines oeuvres sont regroupées sous forme d’ensembles afin de permettre d’imaginer l’univers visuel des esthètes et le type de pièces et de beaux objets à travers lesquels ils exprimaient leurs goûts et leurs idéaux.
Quant à Oscar Wilde, il est présent tout au long du parcours avec des citations où il explique sa conception de l’art. Celle-ci rejoint tellement les idéaux de l’Aesthetic Movement que la chute d’Oscar Wilde, en 1895, discrédita ce mouvement pour toute une génération. Une très belle exposition, riche, claire et bien documentée. Musée d’Orsay 7e. Jusqu’au 15 janvier 2012. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.musee-orsay.fr.


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