LA
PIANISTE
Article
publié dans la Lettre n° 189
LA
PIANISTE. Film franco-autrichien
de Michael Haneke avec Isabelle Huppert, Benoît Magimel, Annie Girardot,
Suzanne Lothar (2001-couleurs- 2h10).
Elevée par une mère castratrice et dominatrice, (Annie Girardot,
formidable), Erika Kohut est, à quarante ans, une pianiste viennoise
de grand renom qui exerce au Conservatoire de Musique où les jeunes
candidats se pressent pour accéder à sa master class. Si Erika reste
une petite fille soumise face à sa mère, elle projette sur ses élèves
ses frustrations et sa violence cachée. Sèche, exigeante et acariâtre,
de dominée, elle devient dominatrice. Incapable d’affronter cette
mère qui l’étouffe, elle soulage ses frustrations non seulement
sur ses élèves mais aussi en regardant des films pornographiques.
Puis, comme pour se punir, elle se mutile sexuellement. Inconsciemment,
elle se détruit, mais cette autodestruction passe par la destruction
de son entourage le plus faible. Sa rencontre avec Walter, un jeune
pianiste arrogant, issu de la bonne bourgeoisie viennoise, va la
faire basculer. Amoureux fougueux, Walter entend posséder l’objet
de son désir en mâle dominant. L’instinct dominateur d’Erika va
d’abord entrer en jeu, elle va le repousser. Puis, sensible malgré
tout à son charme mais ne pouvant se donner, elle lui propose une
relation sadomasochiste qu’il ne peut accepter. Le jeu de la séduction
va se transformer en affrontement.
Pour adapter le roman d’Elfriede Jelinek, Michael Haneke plante
son décor et son action dans le cadre vieillot mais magique de Vienne,
temple mondial de la musique, art omniprésent tout au long du film.
Avec une précision de psychanalyste, il sonde la névrose de son
personnage avec justesse mais se permet tous les excès pour frapper
les esprits ce qui donne des scènes d’une grande violence. Ce film
original et bien construit, récompensé à Cannes par le Grand Prix,
a permis à Isabelle Huppert de recevoir le prix d’interprétation
pour sa prestation magistrale. Malgré le jeu convaincant de Benoît
Magimel, on peut tout de même regretter que le prix d’interprétation
qu’il a obtenu pour le rôle de Walter n’ait pas été attribué à Michel
Piccoli, au sommet de son métier dans le film de Manoel de Oliveira.
Lien:www.cinemas-de-recherche.org/films_soutenus/haneke.htm.
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