OSAMA
Article
publié dans la Lettre n° 227
OSAMA. Film afghan de Siddik Barmak avec
Marina Golbahari, Khawaja Nader, Arif Herati (2003-couleurs-1h25).
Kaboul est aux mains des talibans. Dans la ville dévastée par la
guerre, des femmes recouvertes par leur burqa manifestent. Elles
sont veuves pour la plupart et tout travail leur est interdit. Elles
réclament le droit de gagner de quoi nourrir leur famille, le droit
de vivre. Des barbus en turban surviennent par camions et les dispersent
à coup de lances à incendie. Ils en arrêtent quelques-unes, malheur
à elles. Une femme, accompagnée d’une fillette d’une douzaine d’années,
tente de se frayer un chemin parmi la foule des manifestantes. Elle
parvient non sans mal à l’hôpital en ruines où elle exerce comme
médecin. Le directeur la renvoie. Il ne peut plus l’employer ni
même la payer. A leur retour, la mère et la grand-mère se concertent.
Pour cette dernière, leur seule chance de survie est de travestir
la fillette en garçon. Elle pourra circuler librement et gagner
de quoi les nourrir. Le lendemain, sa mère l’emmène, cheveux coupés
et habillée en garçon, chez un ancien ami de son mari, un épicier
qui, par compassion et malgré sa peur, engage la petite. Mais un
taliban du quartier, intrigué par l’enfant aux traits trop fins
et se doutant de quelque chose, l’embrigade avec les autres gamins
pour suivre l’enseignement qui fera d’eux de véritables petits talibans.
Terrorisée, la fillette ne sait comment se comporter au milieu de
cet univers masculin. La complicité trop tardive d’Espandi, un garçon
qui l’a reconnue et la surnomme Osama, ne lui sera pas d’un grand
secours.
Bien des reportages ont été consacrés à cette période de l’histoire
afghane, à ces « années de plomb » de la domination talibane et
aux exactions commises à l’égard des femmes par ces fous de Dieu.
Mais ils ne sont rien en comparaison du témoignage aussi dramatique
qu'instructif de Siddik Barmak qui est le premier film de fiction
retraçant ces années-là. Inspiré par l’anecdote d’une petite fille
qui, l’école étant interdite aux femmes, coupa ses cheveux et revêtit
des vêtements masculins pour avoir accès au savoir, ce proche du
colonel Massoud met l’accent sur l’enfer vécu par les afghanes et
leur souffrance morale, toute entière contenue dans le regard traqué
d’Osama, rôle tenu par la magnifique petite Marina Golbahari, découverte
par le réalisateur, mendiant dans les rues. Tout au long du film,
ce que vit Osama tétanise et le suspense savamment entretenu ne
permet même plus de se demander si la supercherie va être
découverte mais quand et comment le mollah libidineux qui
la couve du regard va s’abattre sur sa proie. Le spectateur sort
assailli par une multitude de sentiments d’où émergent l’épouvante
et l’indignation face à ces pratiques sans âge, actes où déments
et démons se rejoignent. Lien: www.mgm.com/ua/osama/
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