LA
MAUVAISE EDUCATION
Article
publié dans la Lettre n° 229
LA MAUVAISE EDUCATION. Film espagnol de
Pedro Almodóvar avec Gael Garcia Bernal, Fele Martínez, Javier Camara,
Daniel Giménez Cacho (2004-couleurs-1h50).
Madrid dans les années 80. Alors que Enrique Goded, un jeune réalisateur
à succès, recherche une idée de scénario pour son prochain long
métrage, Ignacio Rodriguez, un ancien camarade de collège, frappe
à sa porte. Enrique a de la peine à reconnaître dans ce jeune homme
mince et petit, l’enfant qu’il a connu dans les années 60, dans
le collège religieux où ils avaient noué des « amitiés particulières
» avant d’être brutalement séparés par le père Manolo, le directeur,
jalousement amoureux d’Ignacio. Celui-ci lui dit avoir changé de
prénom. Il s’appelle dorénavant Ángel. Devenu acteur, il cherche
un rôle à sa mesure. Il apporte au réalisateur « La Visite », un
manuscrit qu’il a écrit en partie sur leurs souvenirs d’enfance
au pensionnat. A sa lecture, Enrique est suffisamment bouleversé
pour décider d’adapter l’histoire afin d’en faire un film. Ángel
y met cependant une condition: interpréter le rôle principal. Malgré
quelques réticences, Enrique accepte. A mesure que se déroule le
tournage, leurs rapports se dégradent. Le comportement d’Ángel oblige
Enrique à enquêter sur sa vie. Il va s’apercevoir que l’acteur est
un imposteur.
La pédophilie, l’homosexualité, la transexualité, la drogue sont
les thèmes abordés par Pedro Almodóvar dans ce film tourmenté où
les femmes, pour une fois, sont pratiquement absentes, excepté la
mère d’Àngel dont le rôle magnifique provoque la seule émotion.
Sans être autobiographique (l’histoire est inspirée de souvenirs
concernant son entourage), il le considère toutefois comme son film
le plus intime, une oeuvre de maturité, où il regarde tout avec
une certaine distance, sans pour autant vouloir régler des comptes.
Malgré un scénario complexe, kaléidoscope de retours en arrière
et de films dans le film, le réalisateur maîtrise suffisamment son
sujet pour nous offrir une oeuvre originale, au fil conducteur policier.
La photo et les superbes prises de vue lui permettent de faire passer
avec art des scènes où la violence et l’érotisme toujours présentes
ne sont que suggérées. Le choix de Gael Garcia Bernal, pour le rôle
principal, est excellent. Véritable caméléon, le comédien navigue
avec un formidable talent entre les quatre personnages de Ignacio,
Àngel, Juan et Zahara dans un film noir où mensonges et fatalité
vont de pair. Enrique Goded n’est sans doute pas sorti indemne de
cette aventure. La dernière phrase du film, gravée sur la pellicule,
nous apprend qu’il a continué de tourner des films avec passion,
mais dans quel sens du terme? Lien: www.lamauvaiseeducation-lefilm.com
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