LOCATAIRES
Article
publié dans la Lettre n° 242
LOCATAIRES. Film coréen de Kim Ki-duk avec
Lee Seung-yeon, Jae Hee, Kwon Hyuk-ho, Joo Jin-ho (2004-couleurs-1h30).
Tae-suk, un jeune homme au visage lisse et impénétrable, se rend
à moto dans les beaux quartiers de la ville et colle des prospectus
sur la serrure de la porte d’entrée des villas. Quelques heures
plus tard, il revient et ouvre par effraction l’une de celles où
le prospectus est resté, signe de l’absence des propriétaires. Il
s’installe, se restaure, se repose mais ne manque pas d’arroser
les plantes, de faire la lessive ou de réparer quelque appareil
en panne. Avant de repartir pour un autre domicile, rite immuable,
il prend une photo de lui devant celle des propriétaires. Lorsqu’il
entre chez un adepte de la violence conjugale, il croit l’endroit
désert et ne soupçonne pas que Sun-houa, la maîtresse de maison,
est là. Surprise sans être effrayée, elle l’interroge sur sa présence
puis, devant le mutisme de Tae-suk, se tait. Après l’avoir observé
un moment, elle finit par accomplir avec lui les gestes quotidiens.
Lorsque le mari rentre, la dispute éclate mais elle le quitte pour
suivre Tae-suk. Leur errance silencieuse et complice les conduit
dans différents lieux jusqu’au jour où ils découvrent dans un logis,
modeste cette fois, le cadavre d’un vieil homme qu’ils inhument
selon les rites les plus stricts. Mais la police, appelée par le
fils, survient.
Après la réalisation de son superbe long métrage Printemps,été,
automne, hiver... et printemps, Kim Ki-duk ne pouvait que persister
dans la magie du rêve. Même si la violence reste présente, il se
démarque encore une fois de ses confrères coréens, en choisissant
de planter sa caméra dans les quartiers chics, aux demeures cossues
et paisibles, où le jardin est une pièce à part entière de l’habitation.
Ici, l’attribut du sport préféré ou l’arme de défense, est le club
de golf. L’itinéraire amoureux de Tae-suk et de Sun-houa suit un
chemin où la frontière entre rêve et réalité reste imprécise, où
la personne physique de Tae-suk finit par ne plus être visible que
pour le regard de Sun-houa. Avec ce film poétique aux images superbes
et aux prises de vue léchées, le réalisateur évite le mélo tout
en mettant l’accent sur le romantisme de l’argument et la poésie
de la forme. En guise de signature, il invite le spectateur à méditer
sa pensée: «Il est impossible de savoir si le monde dans lequel
nous vivons est rêve ou réalité». Lien : www.commeaucinema.com/sitesphp.php3?site=35483.
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